Author: | Collectif | ISBN: | 9782940599165 |
Publisher: | Éditions Contrechamps | Publication: | April 27, 2018 |
Imprint: | Éditions Contrechamps | Language: | French |
Author: | Collectif |
ISBN: | 9782940599165 |
Publisher: | Éditions Contrechamps |
Publication: | April 27, 2018 |
Imprint: | Éditions Contrechamps |
Language: | French |
La rencontre de Bruno Maderna et Heinz Holliger dans le programme du Festival d’Automne 1991 n’a pas été préméditée : elle résulte d’une coïncidence. Elle consacre deux musiciens indépendants, qui se sont développés à l’écart des modes, des mots d’ordre et des pensées d’exclusion, deux compositeurs engagés aussi bien musicalement que socialement, deux hommes d’une rare générosité et d’une grande intégrité. On trouve chez l’un comme chez l’autre ce lien essentiel, mais devenu rare, entre l’activité créatrice et la pratique musicale, entre l’idéal et le pragmatisme, chacune reflétant l’autre à sa mesure. Le talent de l’interprète, chez eux, n’a guère rejailli sur l’image du compositeur, qui comporte une dimension plus secrète, plus exigeante aussi. Mais l’esprit du compositeur éclaire d’une lumière différente sa pratique d’exécution : il suffit d’écouter les nombreux témoignages enregistrés de l’art de Maderna, et ceux toujours croissants de Holliger comme chef ou comme hautboïste pour s’en convaincre. Quelque chose nous est restitué de l’essence même des partitions abordées - on voudrait dire, de l’essence même de la musique. Or, la musique n’est-elle pas le domaine où la médiation sociale trahit le plus violemment les idées artistiques, dressant entre le compositeur et son public potentiel des institutions figées qui se nourrissent d’elles-mêmes et qui font ployer les esprits les plus vigoureux ? Cette contradiction entre pensée et communication traverse toute l’expérience de la modernité. Le conflit entre l’individu et une société qui s’adapte de plus en plus vite ne date pas d’hier : sous l’apparence des conciliations superficielles, il surgit avec la plus grande actualité au sein même de notre fin de siècle. Il apparaît au plus profond de l’acte compositionnel dans la dialectique complexe de la subjectivité revendiquée et de la norme imposée. Est-ce un hasard si Maderna et Holliger ont rencontré Hölderlin sur leur chemin, un poète qui plus qu’aucun autre a inscrit cette tension à l’intérieur de toute son œuvre, de sa vie même ?
La rencontre de Bruno Maderna et Heinz Holliger dans le programme du Festival d’Automne 1991 n’a pas été préméditée : elle résulte d’une coïncidence. Elle consacre deux musiciens indépendants, qui se sont développés à l’écart des modes, des mots d’ordre et des pensées d’exclusion, deux compositeurs engagés aussi bien musicalement que socialement, deux hommes d’une rare générosité et d’une grande intégrité. On trouve chez l’un comme chez l’autre ce lien essentiel, mais devenu rare, entre l’activité créatrice et la pratique musicale, entre l’idéal et le pragmatisme, chacune reflétant l’autre à sa mesure. Le talent de l’interprète, chez eux, n’a guère rejailli sur l’image du compositeur, qui comporte une dimension plus secrète, plus exigeante aussi. Mais l’esprit du compositeur éclaire d’une lumière différente sa pratique d’exécution : il suffit d’écouter les nombreux témoignages enregistrés de l’art de Maderna, et ceux toujours croissants de Holliger comme chef ou comme hautboïste pour s’en convaincre. Quelque chose nous est restitué de l’essence même des partitions abordées - on voudrait dire, de l’essence même de la musique. Or, la musique n’est-elle pas le domaine où la médiation sociale trahit le plus violemment les idées artistiques, dressant entre le compositeur et son public potentiel des institutions figées qui se nourrissent d’elles-mêmes et qui font ployer les esprits les plus vigoureux ? Cette contradiction entre pensée et communication traverse toute l’expérience de la modernité. Le conflit entre l’individu et une société qui s’adapte de plus en plus vite ne date pas d’hier : sous l’apparence des conciliations superficielles, il surgit avec la plus grande actualité au sein même de notre fin de siècle. Il apparaît au plus profond de l’acte compositionnel dans la dialectique complexe de la subjectivité revendiquée et de la norme imposée. Est-ce un hasard si Maderna et Holliger ont rencontré Hölderlin sur leur chemin, un poète qui plus qu’aucun autre a inscrit cette tension à l’intérieur de toute son œuvre, de sa vie même ?