Contes à Mes Petites Amies

Nonfiction, Religion & Spirituality, New Age, History, Fiction & Literature
Cover of the book Contes à Mes Petites Amies by Jean Nicolas Bouilly, Library of Alexandria
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Author: Jean Nicolas Bouilly ISBN: 9781465556202
Publisher: Library of Alexandria Publication: July 29, 2009
Imprint: Library of Alexandria Language: French
Author: Jean Nicolas Bouilly
ISBN: 9781465556202
Publisher: Library of Alexandria
Publication: July 29, 2009
Imprint: Library of Alexandria
Language: French
C’est une grande erreur et souvent une grand injustice, que de juger des personnes qu’on rencontre dans le monde de d’après leur extérieur. L’être le plus obscur, le plus disgracié de la nature, cache quelquefois, sous des vêtements grossiers et des difformités ridicules, les qualités les plus rares, que ne possèdent pas ceux-là mêmes qui l’accablent de leurs mépris. Amélie Dorval habitait, une grande partie de l’année, la jolie terre de la Plaine, située à une lieue et demie de la ville de Tours, sur les délicieux bords de la Loire. Fille unique de la plus tendre mère occupée constamment à diriger son éducation, elle en avait déjà la grâce, l’aménité. Elle était bonne, affable pour tout le monde. Jamais elle ne dédaignait le pauvre qui venait réclamer assistance, ni aucun des gens attachés à son service. On la voyait jouer avec les enfants des jardiniers, avec les petits voisins fils d’agriculteurs ou d’honnêtes ouvriers, sans jamais leur faire sentir qu’ils étaient d’une classe inférieure à la sienne. Elle avait appris de son excellente mère que Dieu dispense, à son gré, les faveurs du rang et de la fortune, et que, tous égaux aux yeux du Créateur, nous ne nous faisons estimer et chérir que par l’élévation de notre âme et la délicatesse de nos sentiments. Aussi la jeune Amélie était-elle aimée, considérée de tout le petit peuple qui l’entourait, et pour lequel on la voyait toujours être la même. C’était à qui lui offrirait les meilleurs fruits des vergers, les plus belles fleurs des jardins. Découvrait-on dans le parc un nid de chardonnerets, de linottes, de tourterelles, aussitôt il lui était indiqué. Parvenait-on, en fauchant les fertiles prairies qu’arrose la Loire, à prendre des cailles, de petits lapins, déjà vigoureux à la course, tout était offert à la bonne Amélie. Elle avait formé une espèce de ménagerie de tous les dons qu’elle avait reçus. Parmi les personnes attachées au service de madame Dorval était un pauvre vieillard infirme appelé Daniel. A force de bêcher la terre depuis quatre-vingts ans, il avait le dos voûté; sa tête, où il ne restait plus que quelques cheveux blancs échappés à l’ardeur du soleil, était penchée vers ses pieds couverts de durillons, qui ralentissaient encore sa marche vacillante. Ses pauvres jambes, affaiblies par la fatigue et par l’âge, supportaient, non sans effort, son corps décharné, et ses mains tremblantes soutenaient à peine le bâton noueux sur lequel il s’appuyait. Toutefois il n’avait aucune autre infirmité. On le rencontrait toujours gai, travaillant autant que ses forces pouvaient le permettre, et chevrotant la vieille chanson du pays
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C’est une grande erreur et souvent une grand injustice, que de juger des personnes qu’on rencontre dans le monde de d’après leur extérieur. L’être le plus obscur, le plus disgracié de la nature, cache quelquefois, sous des vêtements grossiers et des difformités ridicules, les qualités les plus rares, que ne possèdent pas ceux-là mêmes qui l’accablent de leurs mépris. Amélie Dorval habitait, une grande partie de l’année, la jolie terre de la Plaine, située à une lieue et demie de la ville de Tours, sur les délicieux bords de la Loire. Fille unique de la plus tendre mère occupée constamment à diriger son éducation, elle en avait déjà la grâce, l’aménité. Elle était bonne, affable pour tout le monde. Jamais elle ne dédaignait le pauvre qui venait réclamer assistance, ni aucun des gens attachés à son service. On la voyait jouer avec les enfants des jardiniers, avec les petits voisins fils d’agriculteurs ou d’honnêtes ouvriers, sans jamais leur faire sentir qu’ils étaient d’une classe inférieure à la sienne. Elle avait appris de son excellente mère que Dieu dispense, à son gré, les faveurs du rang et de la fortune, et que, tous égaux aux yeux du Créateur, nous ne nous faisons estimer et chérir que par l’élévation de notre âme et la délicatesse de nos sentiments. Aussi la jeune Amélie était-elle aimée, considérée de tout le petit peuple qui l’entourait, et pour lequel on la voyait toujours être la même. C’était à qui lui offrirait les meilleurs fruits des vergers, les plus belles fleurs des jardins. Découvrait-on dans le parc un nid de chardonnerets, de linottes, de tourterelles, aussitôt il lui était indiqué. Parvenait-on, en fauchant les fertiles prairies qu’arrose la Loire, à prendre des cailles, de petits lapins, déjà vigoureux à la course, tout était offert à la bonne Amélie. Elle avait formé une espèce de ménagerie de tous les dons qu’elle avait reçus. Parmi les personnes attachées au service de madame Dorval était un pauvre vieillard infirme appelé Daniel. A force de bêcher la terre depuis quatre-vingts ans, il avait le dos voûté; sa tête, où il ne restait plus que quelques cheveux blancs échappés à l’ardeur du soleil, était penchée vers ses pieds couverts de durillons, qui ralentissaient encore sa marche vacillante. Ses pauvres jambes, affaiblies par la fatigue et par l’âge, supportaient, non sans effort, son corps décharné, et ses mains tremblantes soutenaient à peine le bâton noueux sur lequel il s’appuyait. Toutefois il n’avait aucune autre infirmité. On le rencontrait toujours gai, travaillant autant que ses forces pouvaient le permettre, et chevrotant la vieille chanson du pays

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