« Ainsi, tu me vois comme le vent ? Oui, on peut dire que je suis un voyageur qui passe en courant d'air entre deux mondes. Arrivé ici, je n’ai pratiquement plus de forme. Simplement, mon cœur bondit et se pose sur cette terre. […] Si des obstacles se dressent, il peut rompre même des barres de fer, écraser même des bêtes féroces. » Un étrange jeu narratif entre deux mondes: celui, bien documenté, du Japon du VIIIe siècle et celui, gardé volontairement flou, de la société contemporaine deux époques entre lesquelles, erre le héros, un chef de brigand attiré par le taoïsme et les pratiques occultes des ermites. Des sortilèges le précipitent dans la société moderne où il veille sur un enfant surnaturel autour de qui se déchirent deux adultes prêts à tout pour réaliser leurs rêves. Ishikawa Jun (1899-1987) se fait d’abord remarquer en 1936 avec le récit Fugen !, pour lequel il obtient le prestigieux prix Akutagawa. Ses récits à cette époque présentent des personnages qui peinent à trouver leur place dans la société du Japon contemporain. Cette approche prend des couleurs politiques lorsque, dans La Chanson de Mars (1938), qui lui vaut quelques ennuis avec les autorités, il exprime un certain scepticisme à l’égard du soutien de la population à l’entrée en guerre contre la Chine. Si Ishikawa cesse de composer des fictions pendant les hostilités, il reprend son activité créatrice aussitôt après la défaite. Plusieurs de ses récits (Jésus dans les décombres, 1946 ; La Conception immaculée, 1947) peignent alors le Japon de l’immédiat après-guerre, en ruine aussi bien matériellement que moralement, univers de désolation qui vole en éclats, alors que s’imposent brusquement des éléments aux couleurs chrétiennes. Puis ce sont des récits échevelés autour du sentiment amoureux, où les images supplantent la réalité concrète, où comparaisons et métaphores prennent vie (Le Miroir du gardien de la plaine, 1950 ; Deux ombres, 1950). Suivent des sortent de fables oniriques qui abordent la question de la révolution (Le Faucon, 1953 ; Le Tonnerre, 1954), et dans le même temps, des séries de petits récits parodiques (Histoire à chute, 1950-1951 ; Maya l’abeille, 1952 ; Heidi, 1952). Dans les dernières années de sa vie, Ishikawa Jun se consacre essentiellement à de longs récits qui entraînent le lecteur dans un monde rempli d’intrigues et de secrets, comme La Chronique du vent fou (1971-1980). Un des derniers, Errances sur les Six Voies (1981-1982), met en scène des marginaux révoltés qui célèbrent l’anarchie et l’érotisme, rejettent les idéologies bien-pensantes et les hiérarchies sociales ou religieuses, pour satisfaire leur soif de liberté absolue.
« Ainsi, tu me vois comme le vent ? Oui, on peut dire que je suis un voyageur qui passe en courant d'air entre deux mondes. Arrivé ici, je n’ai pratiquement plus de forme. Simplement, mon cœur bondit et se pose sur cette terre. […] Si des obstacles se dressent, il peut rompre même des barres de fer, écraser même des bêtes féroces. » Un étrange jeu narratif entre deux mondes: celui, bien documenté, du Japon du VIIIe siècle et celui, gardé volontairement flou, de la société contemporaine deux époques entre lesquelles, erre le héros, un chef de brigand attiré par le taoïsme et les pratiques occultes des ermites. Des sortilèges le précipitent dans la société moderne où il veille sur un enfant surnaturel autour de qui se déchirent deux adultes prêts à tout pour réaliser leurs rêves. Ishikawa Jun (1899-1987) se fait d’abord remarquer en 1936 avec le récit Fugen !, pour lequel il obtient le prestigieux prix Akutagawa. Ses récits à cette époque présentent des personnages qui peinent à trouver leur place dans la société du Japon contemporain. Cette approche prend des couleurs politiques lorsque, dans La Chanson de Mars (1938), qui lui vaut quelques ennuis avec les autorités, il exprime un certain scepticisme à l’égard du soutien de la population à l’entrée en guerre contre la Chine. Si Ishikawa cesse de composer des fictions pendant les hostilités, il reprend son activité créatrice aussitôt après la défaite. Plusieurs de ses récits (Jésus dans les décombres, 1946 ; La Conception immaculée, 1947) peignent alors le Japon de l’immédiat après-guerre, en ruine aussi bien matériellement que moralement, univers de désolation qui vole en éclats, alors que s’imposent brusquement des éléments aux couleurs chrétiennes. Puis ce sont des récits échevelés autour du sentiment amoureux, où les images supplantent la réalité concrète, où comparaisons et métaphores prennent vie (Le Miroir du gardien de la plaine, 1950 ; Deux ombres, 1950). Suivent des sortent de fables oniriques qui abordent la question de la révolution (Le Faucon, 1953 ; Le Tonnerre, 1954), et dans le même temps, des séries de petits récits parodiques (Histoire à chute, 1950-1951 ; Maya l’abeille, 1952 ; Heidi, 1952). Dans les dernières années de sa vie, Ishikawa Jun se consacre essentiellement à de longs récits qui entraînent le lecteur dans un monde rempli d’intrigues et de secrets, comme La Chronique du vent fou (1971-1980). Un des derniers, Errances sur les Six Voies (1981-1982), met en scène des marginaux révoltés qui célèbrent l’anarchie et l’érotisme, rejettent les idéologies bien-pensantes et les hiérarchies sociales ou religieuses, pour satisfaire leur soif de liberté absolue.