LA VILLE D’AVIGNON Nous ne savons si le prologue que nous allons mettre sous les yeux du lecteur est bien utile, et cependant nous ne pouvons résister au désir d’en faire, non pas le premier chapitre, mais la préface de ce livre. Plus nous avançons dans la vie, plus nous avançons dans l’art, plus nous demeurons convaincu que rien n’est abrupt et isolé, que la nature et la société marchent par déductions et non par accidents, et que l’événement, fleur joyeuse ou triste, parfumée ou fétide, souriante ou fatale, qui s’ouvre aujourd’hui sous nos yeux, avait son bouton dans le passé et ses racines parfois dans les jours antérieurs à nos jours comme elle aura son fruit dans l’avenir. Jeune, l’homme prend le temps comme il vient, amoureux de la veille, insoucieux du jour, s’inquiétant peu du lendemain. La jeunesse, c’est le printemps avec ses fraîches aurores et ses beaux soirs; si parfois un orage passe au ciel, il éclate, gronde et s’évanouit, laissant le ciel plus azuré, l’atmosphère plus pure, la nature plus souriante qu’auparavant. À quoi bon réfléchir aux causes de cet orage qui passe, rapide comme un caprice, éphémère comme une fantaisie? Avant que nous ayons le mot de l’énigme météorologique, l’orage aura disparu
LA VILLE D’AVIGNON Nous ne savons si le prologue que nous allons mettre sous les yeux du lecteur est bien utile, et cependant nous ne pouvons résister au désir d’en faire, non pas le premier chapitre, mais la préface de ce livre. Plus nous avançons dans la vie, plus nous avançons dans l’art, plus nous demeurons convaincu que rien n’est abrupt et isolé, que la nature et la société marchent par déductions et non par accidents, et que l’événement, fleur joyeuse ou triste, parfumée ou fétide, souriante ou fatale, qui s’ouvre aujourd’hui sous nos yeux, avait son bouton dans le passé et ses racines parfois dans les jours antérieurs à nos jours comme elle aura son fruit dans l’avenir. Jeune, l’homme prend le temps comme il vient, amoureux de la veille, insoucieux du jour, s’inquiétant peu du lendemain. La jeunesse, c’est le printemps avec ses fraîches aurores et ses beaux soirs; si parfois un orage passe au ciel, il éclate, gronde et s’évanouit, laissant le ciel plus azuré, l’atmosphère plus pure, la nature plus souriante qu’auparavant. À quoi bon réfléchir aux causes de cet orage qui passe, rapide comme un caprice, éphémère comme une fantaisie? Avant que nous ayons le mot de l’énigme météorologique, l’orage aura disparu