Author: | Jean Baudoin, Pierre de Boissat | ISBN: | 1230002368344 |
Publisher: | Paris Du Bray 1631 | Publication: | June 9, 2018 |
Imprint: | Language: | French |
Author: | Jean Baudoin, Pierre de Boissat |
ISBN: | 1230002368344 |
Publisher: | Paris Du Bray 1631 |
Publication: | June 9, 2018 |
Imprint: | |
Language: | French |
Contenant La Vie, Et Les Amours d'Alexandre Castriot, arriere-neveu de Scanderbeg, & d'Olympe. la belle Grecque, de la Maison des Paleologues
Tirée des Manuscrits d’Octavio Finelli, de la Duché de Spolette, & recueillie par luy- mesme des Mémoires d’un Caloyer Grec, en la Coste d’Ephese.
Le tout mis en ordre, & donné au public ( En Vieux Français )
Extrait:
LIVRE PREMIER.
Ce qui auint à quelques fugitifs d’Alger, leur combat & leur retraite, avec le regret qu’ils eurent de la mort d’Alexandre.
CHAPITRE PREMIER.
A nuict n’estoit pas encore bien fermée, & le Soleil sembloit avoir du regret de lasser les royalles pompes d’Alger enseueiies dans les tenebres, quand trois ou quatre personnes ayant le visage enveloppe, sortirent du grand Serrail par la porte des jardinages, & venant tout doucement à la marine, se saisirent de la premiere chaloupe, qui les conduisit à force de rames auprès d’un vaisseau de moyenne grandeur, ancré demi-mille hors de l’emboucheure du port, là où s’embarquans, à la aste, avec l’ayde des matelots, ils firent voile selon qu’il pleust au vent de les conduire, n’ayant point à l’heure d’autre soucy que celui d’aller viste, & tenant pour la meilleure de leur route, celle qui les eslongneroit le plustost d’Alger. Estans donc poussez deuers Gibertar, par vn levant & grec, ils le passerent le lendemain au soir, non sans courre quelque fortune : car le temps se rafraischit si fort, qu’ils furent contraints d’abaisser toutes leurs voiles, excepté le beaupré, & de faire soigneusement garde au chasteau de prouë, de peur d’eschoüer contre les costes du destroit. Mais ce fut bien une autre difficulté quand ils furent entrez dans la grande mer Oceane : car l’orage y donnant tout à découvert, joint à la fureur ordinaire de ceste manche, & au contraste des marées, les plus resolus d’entr’eux commencerent à pallir, craignant de trouver leur perte dans leur fuite, & que le lieu de leur azile ne fut celui de leur tombeau. Là commencerent à les saisir les frayeurs de mort, & les repentirs d’avoir entrepris ceste course : là mesme ils souhaiterent la terre de leurs ennemis, jugeans plus desirables d’estre réduits à la mercy d’un combat des-avantageux, voire mesme d’en recevoir une mort certaine, que de la rencontrer dans les abismes de l’Océan. Le seul Pilote ne perdit jamais le jugement, ny le vray point de ion Nort, accostant le terrein d’Afrique avec addresse, de peur d’estre obligé de courre toute la mer Atlantique. C’est ainsi qu’ils passerent d’une nuict à l’autre, où il n’y eut guéres de difference, si ce n’est qu’il survint une triste lumiere au lieu du jour, qui ne seruit qu’à peindre plus affreusement l’image de leur misere, & à la peine de sentir les aproches de la niort, adiouster encore celle de les voir. A ceste clarté confuse parurent sur-tout deux jeunes garçons d’excellente beauté, qui s’embrassans amoureusement come freres, ou comme parfaits amis, sembloient en ceste extremité ne craindre que pour la fortune l’un de l’autre, sans mettre en consideration leur personne mesme. Le plus âgé des deux n’avoit que dix-neuf ans, & l’autre seize. Ils avoient les cheveux longs & déliez, la taille riche, & le visage charmant, au delà de toute merveille : Aussi quoi qu’un peril si grand touchast tous ceux du navire par leur interest propre, si ne laisserent-ils pas d’admirer la constance & la bonne grace de ceux-cy, voire mesme de concevoir quelque opinion de leur salut, ne leur semblant pas que deux creatures si parfaites deussent avoir un destin si rigoureux.
Contenant La Vie, Et Les Amours d'Alexandre Castriot, arriere-neveu de Scanderbeg, & d'Olympe. la belle Grecque, de la Maison des Paleologues
Tirée des Manuscrits d’Octavio Finelli, de la Duché de Spolette, & recueillie par luy- mesme des Mémoires d’un Caloyer Grec, en la Coste d’Ephese.
Le tout mis en ordre, & donné au public ( En Vieux Français )
Extrait:
LIVRE PREMIER.
Ce qui auint à quelques fugitifs d’Alger, leur combat & leur retraite, avec le regret qu’ils eurent de la mort d’Alexandre.
CHAPITRE PREMIER.
A nuict n’estoit pas encore bien fermée, & le Soleil sembloit avoir du regret de lasser les royalles pompes d’Alger enseueiies dans les tenebres, quand trois ou quatre personnes ayant le visage enveloppe, sortirent du grand Serrail par la porte des jardinages, & venant tout doucement à la marine, se saisirent de la premiere chaloupe, qui les conduisit à force de rames auprès d’un vaisseau de moyenne grandeur, ancré demi-mille hors de l’emboucheure du port, là où s’embarquans, à la aste, avec l’ayde des matelots, ils firent voile selon qu’il pleust au vent de les conduire, n’ayant point à l’heure d’autre soucy que celui d’aller viste, & tenant pour la meilleure de leur route, celle qui les eslongneroit le plustost d’Alger. Estans donc poussez deuers Gibertar, par vn levant & grec, ils le passerent le lendemain au soir, non sans courre quelque fortune : car le temps se rafraischit si fort, qu’ils furent contraints d’abaisser toutes leurs voiles, excepté le beaupré, & de faire soigneusement garde au chasteau de prouë, de peur d’eschoüer contre les costes du destroit. Mais ce fut bien une autre difficulté quand ils furent entrez dans la grande mer Oceane : car l’orage y donnant tout à découvert, joint à la fureur ordinaire de ceste manche, & au contraste des marées, les plus resolus d’entr’eux commencerent à pallir, craignant de trouver leur perte dans leur fuite, & que le lieu de leur azile ne fut celui de leur tombeau. Là commencerent à les saisir les frayeurs de mort, & les repentirs d’avoir entrepris ceste course : là mesme ils souhaiterent la terre de leurs ennemis, jugeans plus desirables d’estre réduits à la mercy d’un combat des-avantageux, voire mesme d’en recevoir une mort certaine, que de la rencontrer dans les abismes de l’Océan. Le seul Pilote ne perdit jamais le jugement, ny le vray point de ion Nort, accostant le terrein d’Afrique avec addresse, de peur d’estre obligé de courre toute la mer Atlantique. C’est ainsi qu’ils passerent d’une nuict à l’autre, où il n’y eut guéres de difference, si ce n’est qu’il survint une triste lumiere au lieu du jour, qui ne seruit qu’à peindre plus affreusement l’image de leur misere, & à la peine de sentir les aproches de la niort, adiouster encore celle de les voir. A ceste clarté confuse parurent sur-tout deux jeunes garçons d’excellente beauté, qui s’embrassans amoureusement come freres, ou comme parfaits amis, sembloient en ceste extremité ne craindre que pour la fortune l’un de l’autre, sans mettre en consideration leur personne mesme. Le plus âgé des deux n’avoit que dix-neuf ans, & l’autre seize. Ils avoient les cheveux longs & déliez, la taille riche, & le visage charmant, au delà de toute merveille : Aussi quoi qu’un peril si grand touchast tous ceux du navire par leur interest propre, si ne laisserent-ils pas d’admirer la constance & la bonne grace de ceux-cy, voire mesme de concevoir quelque opinion de leur salut, ne leur semblant pas que deux creatures si parfaites deussent avoir un destin si rigoureux.