Author: | Ivan Tourgueniev | ISBN: | 1230001564815 |
Publisher: | JBR | Publication: | February 27, 2017 |
Imprint: | Language: | French |
Author: | Ivan Tourgueniev |
ISBN: | 1230001564815 |
Publisher: | JBR |
Publication: | February 27, 2017 |
Imprint: | |
Language: | French |
Journal d'un homme de trop (Edition Intégrale - Version Entièrement Illustrée)
*Inclus une courte biographie de Ivan Tourgueniev
Descriptif : Un homme, encore jeune et malade, s'éteint peu à peu. Il emploie ses dernières forces à noter l'imminence de sa disparition tout en se remémorant les moments importants de sa vie. Ainsi se dessine le tableau d'une société russe provinciale, médiocre et mortifère, parsemée d'événements romanesques, tels qu'un amour contrarié, un bal ou un duel. La vanité de toute entreprise, la fragilité humaine et le sentiment de la mort envahissent ces pages merveilleusement écrites. Seul le sentiment de la nature apporte un apaisement fugitif à cette lutte contre l'inéluctabilité du destin.
Extrait : Je grandis mal et sans joie. Mes parents me témoignaient de la tendresse ; mais la vie ne m’en était pas plus douce. Ouvertement adonné à un vice dégradant et ruineux, mon père n’avait aucune autorité dans sa propre maison. Il reconnaissait son abjection, et, n’ayant pas la force de renoncer à la passion qui le dominait, il cherchait du moins à mériter l’indulgence de sa femme par une soumission à toute épreuve. Ma mère supportait son malheur avec cette magnifique et fastueuse longanimité de la vertu dans laquelle respire tant d’orgueil et d’amour-propre. Elle ne faisait jamais de reproche à mon père ; elle lui donnait silencieusement le fond de sa bourse et payait ses dettes. Présente ou absente, il la portait aux nues ; mais il n’aimait pas rester à la maison, et il ne me caressait qu’en secret, à la dérobée, comme s’il eût craint de me porter malheur. Ses traits altérés avaient alors une telle expression de bonté, le rire fiévreux qui errait sur ses lèvres se changeait en un sourire si touchant, ses yeux bruns entourés de rides fines s’arrêtaient avec tant d’amour sur moi, que je pressais involontairement ma joue contre sa joue humide et chaude de larmes. J’essuyais ces larmes avec mon mouchoir ; mais elles recommençaient à couler sans effort, comme l’eau déborde d’un vase trop plein. Je me mettais aussi à pleurer, et il me consolait. Il pressait mes mains entre les siennes, et ses lèvres tremblantes me couvraient de baisers. Voilà déjà plus de vingt ans qu’il est mort, et pourtant chaque fois que je pense à mon pauvre père, des sanglots muets me montent au gosier, et mon cœur bat dans ma poitrine ; il bat avec tant de chaleur et d’amertume, il est accablé d’une si douloureuse compassion, qu’on croirait qu’il lui reste encore longtemps à battre et à regretter.
Journal d'un homme de trop (Edition Intégrale - Version Entièrement Illustrée)
*Inclus une courte biographie de Ivan Tourgueniev
Descriptif : Un homme, encore jeune et malade, s'éteint peu à peu. Il emploie ses dernières forces à noter l'imminence de sa disparition tout en se remémorant les moments importants de sa vie. Ainsi se dessine le tableau d'une société russe provinciale, médiocre et mortifère, parsemée d'événements romanesques, tels qu'un amour contrarié, un bal ou un duel. La vanité de toute entreprise, la fragilité humaine et le sentiment de la mort envahissent ces pages merveilleusement écrites. Seul le sentiment de la nature apporte un apaisement fugitif à cette lutte contre l'inéluctabilité du destin.
Extrait : Je grandis mal et sans joie. Mes parents me témoignaient de la tendresse ; mais la vie ne m’en était pas plus douce. Ouvertement adonné à un vice dégradant et ruineux, mon père n’avait aucune autorité dans sa propre maison. Il reconnaissait son abjection, et, n’ayant pas la force de renoncer à la passion qui le dominait, il cherchait du moins à mériter l’indulgence de sa femme par une soumission à toute épreuve. Ma mère supportait son malheur avec cette magnifique et fastueuse longanimité de la vertu dans laquelle respire tant d’orgueil et d’amour-propre. Elle ne faisait jamais de reproche à mon père ; elle lui donnait silencieusement le fond de sa bourse et payait ses dettes. Présente ou absente, il la portait aux nues ; mais il n’aimait pas rester à la maison, et il ne me caressait qu’en secret, à la dérobée, comme s’il eût craint de me porter malheur. Ses traits altérés avaient alors une telle expression de bonté, le rire fiévreux qui errait sur ses lèvres se changeait en un sourire si touchant, ses yeux bruns entourés de rides fines s’arrêtaient avec tant d’amour sur moi, que je pressais involontairement ma joue contre sa joue humide et chaude de larmes. J’essuyais ces larmes avec mon mouchoir ; mais elles recommençaient à couler sans effort, comme l’eau déborde d’un vase trop plein. Je me mettais aussi à pleurer, et il me consolait. Il pressait mes mains entre les siennes, et ses lèvres tremblantes me couvraient de baisers. Voilà déjà plus de vingt ans qu’il est mort, et pourtant chaque fois que je pense à mon pauvre père, des sanglots muets me montent au gosier, et mon cœur bat dans ma poitrine ; il bat avec tant de chaleur et d’amertume, il est accablé d’une si douloureuse compassion, qu’on croirait qu’il lui reste encore longtemps à battre et à regretter.