Author: | Stella Blandy, Adrien Marie | ISBN: | 1230002427539 |
Publisher: | J. Hetzel (Paris) 1888 | Publication: | July 14, 2018 |
Imprint: | Language: | French |
Author: | Stella Blandy, Adrien Marie |
ISBN: | 1230002427539 |
Publisher: | J. Hetzel (Paris) 1888 |
Publication: | July 14, 2018 |
Imprint: | |
Language: | French |
Extrait: Joseph Courot se trouva chez lui à point nommé pour recevoir l’invitation que le père Billot lui fit dans les règles ; voulant y faire honneur, il cria à sa ménagère d’aller chercher à la cave une bouteille de vin mousseux de Viré, afin, dit-il, de marier le blanc au rouge dans l’estomac du père Billot. Celui-ci ne fut pas dupe de cette amabilité et ne se trompa point en jugeant qu’elle avait pour but de le faire jaser sur ce qui se passait aux Ravières ; mais il ne pouvait refuser cette politesse adressée par un riche cultivateur, à lui, simple vigneron, et il s’assit dans la vaste cuisine enfumée, auprès du feu de vieilles souches, dont les lueurs bleuâtres faisaient danser des paillettes dans les assiettes en faïence peinte accotées au dressoir de noyer.
Quelques minutes après, la bouteille de Viré était placée sur la longue table entre une assiettée de noix et une pile de gaufres, et les dernières gouttes de la première santé portée pétillaient encore au fond des verres, lorsque Joseph Courot dit au maître valet de ferme :
« Est-ce que c’est pour célébrer la fin de son deuil que ton maître nous promet une si belle fête ! Depuis qu’il a perdu sa fille et son gendre, les Ravières étaient bien monotones. Est-ce qu’on dansera comme de coutume après le plantage de la vigne ?
— Oh ! non, répondit le père Billot hochant tristement la tète. Pourtant, que mon maître eût ou non le cœur gai, il fallait planter sa vigne des Glaçons, puisque le terrain avait été défoncé, préparé, et, dès lors, il ne pouvait moins faire que d’inviter ses amis. Mais, de longtemps, le plaisir ne rentrera aux Ravières. Songez donc, maître Courot, perdre en dix jours, il y a un an, sa fille et son gendre, c’est de quoi amasser au cœur de mon maître de la peine pour longtemps, autant dire pour sa vie.
— Oui, dit Joseph Courot, car Philibert, le fils de Claude Chardet, n’est guère propre à le consoler. Il est si simple qu’il en est sot. En voilà encore un que l’instruction a hébété !
— Je ne sais point, je ne m’y connais guère, reprit le père Billot ; mais, si maître Philibert Chardet s’amuse à des tas de choses qui m’étonnent, comme à piquer sur du carton des rangées de bêtes que j’écraserais sous mon sabot, à ramasser, à dessiner des herbes que je fourrerais dans le râtelier de mes animaux, il se connaît au temps mieux que le meilleur almanach, il sait soigner les bestiaux malades, et ne peut être trompé dans ses achats par aucun maquignon. Puis c’est un homme juste, bon au pauvre monde et qui commande avec douceur.
— Et cela te plaît, car Claude Chardet est dur, lui, n’est-ce pas ?
— Bah ! il est plus dur pour lui-même que pour ses gens gagés, le premier debout, le dernier couché, comme s’il avait son pain à gagner. C’est de la race intrépide des vieux Chiserots ; la tête vive, les bras actifs, un vrai Sarrasin, quoi 1 ! »
Joseph Courot, qui entendait cet éloge avec dépit, frappa du poing sur la table.
« Un vrai Sarrasin ?... Non, dit-il. Sais-tu seulement, père Billot, — car enfin ces vieilles idées commencent à se perdre, — sais-tu seulement ce que c’est qu’un vrai Sarrasin ?
— Je reconnais votre chanson à son air, répliqua le père Billot d’un ton narquois. Pour être un vrai Sarrasin, à votre goût, mon maître, Claude Chardet aurait dû marier sa fille avec n’importe lequel de vos amis, avec le meilleur peut-être, et recevoir à coups de triqueles prétendants venus des autres communes. Cela se pratiquait ainsi autrefois ; mais les modes changent. Qu’y faire ?
L’ONCLE PHILIBERT
CHAPITRE PREMIER - LE DOMAINE DES RAVIÈRES. — LE CHAGRIN DE CLAUDE CHARDET. UNE ABSENCE MYSTÉRIEUSE.
CHAPITRE II - ONCLES ET NEVEUX. — LES ÉTONNEMENTS D’ALICE. — L’EXPLOIT MALHEUREUX DE PAUL.
CHAPITRE III - LA SURPRISE DU RETOUR. — LES SURPRISES VILLAGEOISES. —L’INCIDENT DU BÉNICHEUX.
CHAPITRE IV - LES MANIES DE L’ONCLE PHILIBERT. — UN JEUNE DE SEPT MOIS. PAUL ET ALICE OBTIENNENT UN SURSIS.
CHAPITRE V - LE CHÉTI PÉTRUS ET LA BÊTE A BON DIEU. — PORTE CLOSE. —PAR LE TROU DE LA HAIE. — LES CONSEILS DE LA VIEILLE HOTESSE.
CHAPITRE VI - SANS ABRI PENDANT L’ORAGE. — LA CHARRETTE VOLÉE. FUNESTES SUITES D’UNE ÉQUIPÉE. LE REBOUTEUR. — SUBITE SYMPATHIE DE PAUL POUR L’ENFANT INCONNU.
CHAPITRE VII - PITEUX RETOUR AU LOGIS. — LE FRANC PARLER DE JACQUES SAUVIAC. — INSULTE FAITE A SES BONS OFFICES. LE COUP DE TÊTE DE VITTORIO.
CHAPITRE VIII - VISITE DOMICILIAIRE DANS LES PÉNATES ERRANTS DE L’ÉTAMEUR. CURIEUSES TROUVAILLES. — COMMENT L’ON DEVIENT REBOUTEUR. LES IDÉES DE VITTORIO.
CHAPITRE IX - PAUL A UN AMI. — LA MORALITÉ D’UN SONNET. L’HORLOGE DE LA SALLE BASSE.
CHAPITRE X - LES SECRETS DE L’ONCLE PHILIBERT. — LE DON DES PRÉMICES. UNE PROPOSITION INACCEPTABLE.
CHAPITRE XI - DANS LA RIVIÈRE. — L’ÉCOLE BUISSONNIÈRE DE JOSEPH COUROT. ENTRE JEUNES NATURALISTES. LE PROVERBE DE LA LOTTE. — ALARME SUBITE.
CHAPITRE XII - LE DRAME DU SAUVETAGE. — LA RECONNAISSANCE DU SABOTIER. — LE PRIX D’UN ACTE DE DÉVOUEMENT.
CHAPITRE XIII - LA DOULEUR DE VITTORIO. — LE BON SENS DU MAITRE DES RAVIÈRES. UNE ENQUÊTE BLESSANTE.
CHAPITRE XIV - RÉVÉLATION INATTENDUE. — UNE DISCUSSION ORAGEUSE. — DÉPART SANS ADIEUX.
CHAPITRE XV - NAIVE LEÇON DE GÉNÉROSITÉ. — VITTORIO SUR LE GRAND CHEMIN. PAUVRES GENS S’AIDANT ENTRE EUX.
CHAPITRE XVI - LA POLITIQUE DE LA SABOTIÈRE. — INJURES ET FAVEURS SIMULTANÉES. SOUVENIRS D’ENFANCE.
CHAPITRE XVII - UN HOTE INDISCRET. — CHASSE AUX PHALÈNES. — LA TERRE D’EMPIRE ET LE ROYAUME.
CHAPITRE XVIII - VENDANGES. — LA REVANCHE DE L’ONCLE PHILIBERT. — LA LETTRE DU CURÉ DE MOZAT.
CHAPITRE XIX - LE PARRAIN TIRÉ AU SORT. — PROJETS D’AVENIR. — LES SCRUPULES DE CLAUDE CHARDET.
CHAPITRE XX - GAIS PROPOS ET PROPOS SÉRIEUX AUX VEILLÉES DANS L’ÉTABLE. — LA MÉDAILLE D’OR DU COMICE. — VITTORIO PREND UN PARTI.
CHAPITRE XXI - ENTRE PARRAIN ET FILLEUL. — A MÊME CHANCE ACCUEIL DIFFÉRENT. A LA NOCE DU BÉNICHEUX.
CHAPITRE XXII - VITTORIO SAUVE SON AMI. — LE SECRET DE LA VIEILLE BIBLE. — UN ONCLE D’AMÉRIQUE. — LA DESTINÉE DE VITTORIO.
Extrait: Joseph Courot se trouva chez lui à point nommé pour recevoir l’invitation que le père Billot lui fit dans les règles ; voulant y faire honneur, il cria à sa ménagère d’aller chercher à la cave une bouteille de vin mousseux de Viré, afin, dit-il, de marier le blanc au rouge dans l’estomac du père Billot. Celui-ci ne fut pas dupe de cette amabilité et ne se trompa point en jugeant qu’elle avait pour but de le faire jaser sur ce qui se passait aux Ravières ; mais il ne pouvait refuser cette politesse adressée par un riche cultivateur, à lui, simple vigneron, et il s’assit dans la vaste cuisine enfumée, auprès du feu de vieilles souches, dont les lueurs bleuâtres faisaient danser des paillettes dans les assiettes en faïence peinte accotées au dressoir de noyer.
Quelques minutes après, la bouteille de Viré était placée sur la longue table entre une assiettée de noix et une pile de gaufres, et les dernières gouttes de la première santé portée pétillaient encore au fond des verres, lorsque Joseph Courot dit au maître valet de ferme :
« Est-ce que c’est pour célébrer la fin de son deuil que ton maître nous promet une si belle fête ! Depuis qu’il a perdu sa fille et son gendre, les Ravières étaient bien monotones. Est-ce qu’on dansera comme de coutume après le plantage de la vigne ?
— Oh ! non, répondit le père Billot hochant tristement la tète. Pourtant, que mon maître eût ou non le cœur gai, il fallait planter sa vigne des Glaçons, puisque le terrain avait été défoncé, préparé, et, dès lors, il ne pouvait moins faire que d’inviter ses amis. Mais, de longtemps, le plaisir ne rentrera aux Ravières. Songez donc, maître Courot, perdre en dix jours, il y a un an, sa fille et son gendre, c’est de quoi amasser au cœur de mon maître de la peine pour longtemps, autant dire pour sa vie.
— Oui, dit Joseph Courot, car Philibert, le fils de Claude Chardet, n’est guère propre à le consoler. Il est si simple qu’il en est sot. En voilà encore un que l’instruction a hébété !
— Je ne sais point, je ne m’y connais guère, reprit le père Billot ; mais, si maître Philibert Chardet s’amuse à des tas de choses qui m’étonnent, comme à piquer sur du carton des rangées de bêtes que j’écraserais sous mon sabot, à ramasser, à dessiner des herbes que je fourrerais dans le râtelier de mes animaux, il se connaît au temps mieux que le meilleur almanach, il sait soigner les bestiaux malades, et ne peut être trompé dans ses achats par aucun maquignon. Puis c’est un homme juste, bon au pauvre monde et qui commande avec douceur.
— Et cela te plaît, car Claude Chardet est dur, lui, n’est-ce pas ?
— Bah ! il est plus dur pour lui-même que pour ses gens gagés, le premier debout, le dernier couché, comme s’il avait son pain à gagner. C’est de la race intrépide des vieux Chiserots ; la tête vive, les bras actifs, un vrai Sarrasin, quoi 1 ! »
Joseph Courot, qui entendait cet éloge avec dépit, frappa du poing sur la table.
« Un vrai Sarrasin ?... Non, dit-il. Sais-tu seulement, père Billot, — car enfin ces vieilles idées commencent à se perdre, — sais-tu seulement ce que c’est qu’un vrai Sarrasin ?
— Je reconnais votre chanson à son air, répliqua le père Billot d’un ton narquois. Pour être un vrai Sarrasin, à votre goût, mon maître, Claude Chardet aurait dû marier sa fille avec n’importe lequel de vos amis, avec le meilleur peut-être, et recevoir à coups de triqueles prétendants venus des autres communes. Cela se pratiquait ainsi autrefois ; mais les modes changent. Qu’y faire ?
L’ONCLE PHILIBERT
CHAPITRE PREMIER - LE DOMAINE DES RAVIÈRES. — LE CHAGRIN DE CLAUDE CHARDET. UNE ABSENCE MYSTÉRIEUSE.
CHAPITRE II - ONCLES ET NEVEUX. — LES ÉTONNEMENTS D’ALICE. — L’EXPLOIT MALHEUREUX DE PAUL.
CHAPITRE III - LA SURPRISE DU RETOUR. — LES SURPRISES VILLAGEOISES. —L’INCIDENT DU BÉNICHEUX.
CHAPITRE IV - LES MANIES DE L’ONCLE PHILIBERT. — UN JEUNE DE SEPT MOIS. PAUL ET ALICE OBTIENNENT UN SURSIS.
CHAPITRE V - LE CHÉTI PÉTRUS ET LA BÊTE A BON DIEU. — PORTE CLOSE. —PAR LE TROU DE LA HAIE. — LES CONSEILS DE LA VIEILLE HOTESSE.
CHAPITRE VI - SANS ABRI PENDANT L’ORAGE. — LA CHARRETTE VOLÉE. FUNESTES SUITES D’UNE ÉQUIPÉE. LE REBOUTEUR. — SUBITE SYMPATHIE DE PAUL POUR L’ENFANT INCONNU.
CHAPITRE VII - PITEUX RETOUR AU LOGIS. — LE FRANC PARLER DE JACQUES SAUVIAC. — INSULTE FAITE A SES BONS OFFICES. LE COUP DE TÊTE DE VITTORIO.
CHAPITRE VIII - VISITE DOMICILIAIRE DANS LES PÉNATES ERRANTS DE L’ÉTAMEUR. CURIEUSES TROUVAILLES. — COMMENT L’ON DEVIENT REBOUTEUR. LES IDÉES DE VITTORIO.
CHAPITRE IX - PAUL A UN AMI. — LA MORALITÉ D’UN SONNET. L’HORLOGE DE LA SALLE BASSE.
CHAPITRE X - LES SECRETS DE L’ONCLE PHILIBERT. — LE DON DES PRÉMICES. UNE PROPOSITION INACCEPTABLE.
CHAPITRE XI - DANS LA RIVIÈRE. — L’ÉCOLE BUISSONNIÈRE DE JOSEPH COUROT. ENTRE JEUNES NATURALISTES. LE PROVERBE DE LA LOTTE. — ALARME SUBITE.
CHAPITRE XII - LE DRAME DU SAUVETAGE. — LA RECONNAISSANCE DU SABOTIER. — LE PRIX D’UN ACTE DE DÉVOUEMENT.
CHAPITRE XIII - LA DOULEUR DE VITTORIO. — LE BON SENS DU MAITRE DES RAVIÈRES. UNE ENQUÊTE BLESSANTE.
CHAPITRE XIV - RÉVÉLATION INATTENDUE. — UNE DISCUSSION ORAGEUSE. — DÉPART SANS ADIEUX.
CHAPITRE XV - NAIVE LEÇON DE GÉNÉROSITÉ. — VITTORIO SUR LE GRAND CHEMIN. PAUVRES GENS S’AIDANT ENTRE EUX.
CHAPITRE XVI - LA POLITIQUE DE LA SABOTIÈRE. — INJURES ET FAVEURS SIMULTANÉES. SOUVENIRS D’ENFANCE.
CHAPITRE XVII - UN HOTE INDISCRET. — CHASSE AUX PHALÈNES. — LA TERRE D’EMPIRE ET LE ROYAUME.
CHAPITRE XVIII - VENDANGES. — LA REVANCHE DE L’ONCLE PHILIBERT. — LA LETTRE DU CURÉ DE MOZAT.
CHAPITRE XIX - LE PARRAIN TIRÉ AU SORT. — PROJETS D’AVENIR. — LES SCRUPULES DE CLAUDE CHARDET.
CHAPITRE XX - GAIS PROPOS ET PROPOS SÉRIEUX AUX VEILLÉES DANS L’ÉTABLE. — LA MÉDAILLE D’OR DU COMICE. — VITTORIO PREND UN PARTI.
CHAPITRE XXI - ENTRE PARRAIN ET FILLEUL. — A MÊME CHANCE ACCUEIL DIFFÉRENT. A LA NOCE DU BÉNICHEUX.
CHAPITRE XXII - VITTORIO SAUVE SON AMI. — LE SECRET DE LA VIEILLE BIBLE. — UN ONCLE D’AMÉRIQUE. — LA DESTINÉE DE VITTORIO.