Author: | Anatole France | ISBN: | 1230000227841 |
Publisher: | Anatole France | Publication: | March 25, 2014 |
Imprint: | Language: | French |
Author: | Anatole France |
ISBN: | 1230000227841 |
Publisher: | Anatole France |
Publication: | March 25, 2014 |
Imprint: | |
Language: | French |
EXTRAIT:
J’ai nom Elme-Laurent-Jacques Ménétrier. Mon père, Léonard Ménétrier, était
rôtisseur rue Saint-Jacques à l’enseigne de la Reine Pédauque, qui, comme on
sait, avait les pieds palmés à la façon des oies et des canards.
Son auvent s’élevait vis-à-vis de Saint-Benoît-le-Bétourné, entre madame Gilles,
mercière aux Trois-Pucelles, et M. Blaizot, libraire à l’Image Sainte-Catherine,
non loin du Petit Bacchus, dont la grille, ornée de pampres, faisait le coin de
la rue des Cordiers. Il m’aimait beaucoup et quand, après souper, j’étais couché
dans mon petit lit, il me prenait la main, soulevait l’un après l’autre mes
doigts, en commençant par le pouce, et disait :
- Celui-là l’a tué, celui-là l’a plumé, celui-là l’a fricassé, celui-là l’a
mangé. Et le petit Riquiqui, qui n’a rien du tout.
« Sauce, sauce, sauce, ajoutait-il en me chatouillant, avec le bout de mon petit
doigt, le creux de la main.
Et il riait très fort. Je riais aussi en m’endormant, et ma mère affirmait que
le sourire restait encore sur mes lèvres le lendemain matin.
Mon père était bon rôtisseur et craignait Dieu. C’est pourquoi il portait, aux
jours de fête, la bannière des rôtisseurs, sur laquelle un beau saint Laurent
était brodé avec son gril et une palme d’or. Il avait coutume de me dire :
- Jacquot, ta mère est une sainte et digne femme.
EXTRAIT:
J’ai nom Elme-Laurent-Jacques Ménétrier. Mon père, Léonard Ménétrier, était
rôtisseur rue Saint-Jacques à l’enseigne de la Reine Pédauque, qui, comme on
sait, avait les pieds palmés à la façon des oies et des canards.
Son auvent s’élevait vis-à-vis de Saint-Benoît-le-Bétourné, entre madame Gilles,
mercière aux Trois-Pucelles, et M. Blaizot, libraire à l’Image Sainte-Catherine,
non loin du Petit Bacchus, dont la grille, ornée de pampres, faisait le coin de
la rue des Cordiers. Il m’aimait beaucoup et quand, après souper, j’étais couché
dans mon petit lit, il me prenait la main, soulevait l’un après l’autre mes
doigts, en commençant par le pouce, et disait :
- Celui-là l’a tué, celui-là l’a plumé, celui-là l’a fricassé, celui-là l’a
mangé. Et le petit Riquiqui, qui n’a rien du tout.
« Sauce, sauce, sauce, ajoutait-il en me chatouillant, avec le bout de mon petit
doigt, le creux de la main.
Et il riait très fort. Je riais aussi en m’endormant, et ma mère affirmait que
le sourire restait encore sur mes lèvres le lendemain matin.
Mon père était bon rôtisseur et craignait Dieu. C’est pourquoi il portait, aux
jours de fête, la bannière des rôtisseurs, sur laquelle un beau saint Laurent
était brodé avec son gril et une palme d’or. Il avait coutume de me dire :
- Jacquot, ta mère est une sainte et digne femme.