Author: | Théophile Gautier | ISBN: | 1230001163346 |
Publisher: | CP | Publication: | June 6, 2016 |
Imprint: | Language: | French |
Author: | Théophile Gautier |
ISBN: | 1230001163346 |
Publisher: | CP |
Publication: | June 6, 2016 |
Imprint: | |
Language: | French |
Une pâle aurore de novembre encore mal éveillée se frottait les yeux derrière une courtine de nuages grisâtres, et déjà le digne hôtelier Geordie se tenait debout sur le seuil de son auberge, les bras aussi croisés que le permettait un abdomen plus que majestueux, qui témoignait on ne peut plus favorablement de la cuisine du Lion Rouge.
Il avait l’air profondément tranquille d’un aubergiste qui, étant unique, se sent maître de la situation et ne craint pas que les voyageurs puissent lui échapper, car le Lion-Rouge était en ce temps-là la seule hôtellerie de Folkstone.
Folkstone, au temps où se passait l’histoire que nous entreprenons de raconter, n’était qu’un petit village dont les maisons de briques jaunes et de planches goudronnées s’échelonnaient un peu au hasard sur la pente qui, de la montagne, descend à la mer.
La maison de Geordie était une des plus belles, sinon la plus belle de Folkstone. À l’angle du bâtiment, du bout d’une volute de fer élégamment contournée, se balançait à la brise de mer le lion rouge découpé en tôle, dont les vapeurs salines de l’Océan nécessitaient de raviver fréquemment les couleurs, et qui, repeint depuis peu, flamboyait aussi fièrement qu’un lion de gueule sur champ d’or dans un manuel héraldique.
Geordie rêvait, mais les rêves qu’il faisait n’avaient rien de poétique. Il supputait dans sa tête les bénéfices du mois qui venait de s’écouler, et, comme ils dépassaient de quelques guinées le gain des mois précédents, Geordie pensait que si cette augmentation se soutenait, il pourrait, dans peu de temps, acheter cette pièce de terre dont il avait une si grande envie et qui faisait dans ses domaines un angle si désagréable.
Il en était là de sa rêverie, lorsqu’un individu de mine assez farouche, planté devant lui depuis quelques minutes, mais que sa préoccupation l’empêchait d’apercevoir, ne trouvant sans doute d’autres moyens de se faire remarquer, lui appliqua sur le ventre une de ces tapes que les hommes osseux et maigres se plaisent à donner aux hommes obèses, par ironie ou par vengeance.
Une pâle aurore de novembre encore mal éveillée se frottait les yeux derrière une courtine de nuages grisâtres, et déjà le digne hôtelier Geordie se tenait debout sur le seuil de son auberge, les bras aussi croisés que le permettait un abdomen plus que majestueux, qui témoignait on ne peut plus favorablement de la cuisine du Lion Rouge.
Il avait l’air profondément tranquille d’un aubergiste qui, étant unique, se sent maître de la situation et ne craint pas que les voyageurs puissent lui échapper, car le Lion-Rouge était en ce temps-là la seule hôtellerie de Folkstone.
Folkstone, au temps où se passait l’histoire que nous entreprenons de raconter, n’était qu’un petit village dont les maisons de briques jaunes et de planches goudronnées s’échelonnaient un peu au hasard sur la pente qui, de la montagne, descend à la mer.
La maison de Geordie était une des plus belles, sinon la plus belle de Folkstone. À l’angle du bâtiment, du bout d’une volute de fer élégamment contournée, se balançait à la brise de mer le lion rouge découpé en tôle, dont les vapeurs salines de l’Océan nécessitaient de raviver fréquemment les couleurs, et qui, repeint depuis peu, flamboyait aussi fièrement qu’un lion de gueule sur champ d’or dans un manuel héraldique.
Geordie rêvait, mais les rêves qu’il faisait n’avaient rien de poétique. Il supputait dans sa tête les bénéfices du mois qui venait de s’écouler, et, comme ils dépassaient de quelques guinées le gain des mois précédents, Geordie pensait que si cette augmentation se soutenait, il pourrait, dans peu de temps, acheter cette pièce de terre dont il avait une si grande envie et qui faisait dans ses domaines un angle si désagréable.
Il en était là de sa rêverie, lorsqu’un individu de mine assez farouche, planté devant lui depuis quelques minutes, mais que sa préoccupation l’empêchait d’apercevoir, ne trouvant sans doute d’autres moyens de se faire remarquer, lui appliqua sur le ventre une de ces tapes que les hommes osseux et maigres se plaisent à donner aux hommes obèses, par ironie ou par vengeance.