Bien loin, bien loin de la civilisation, s'étendent à l'infini, dans les vastes Amériques, des plaines immenses entrecoupées de prairies plus immenses encore. C'est, ou plutôt, ce fut le territoire Indien. Ces TERRES d'OR, convoitées par d'acharnés aventuriers, sont devenues la proie du premier occupant; elles ont été divisées, morcelées, mises en lambeaux par leurs insatiables hôtes: la solitude a été mise au pillage; chacun a voulu avoir sa part à la curée. Arpenteurs, spéculateurs, locataires, fermiers, trafiquants, forestiers, chasseurs, et par-dessus tout chercheurs d'aventures, se sont abattus par légions sur le patrimoine Indien et s'en sont emparés violemment, par droit de conquête. Les enfants perdus de la civilisation se sont installés là comme chez eux, et bientôt les noms de Kansas, de Nebraska, sont devenus aussi familiers que ceux de New-York, Londres, ou Paris: les Pawnies, les Ottawas, les Ottoes, les Kickappos, les Puncas, toutes les peuplades aborigènes ont disparu successivement comme des foyers éteints, refoulées par l'incessante et implacable pression des Faces-Pâles. Des ogres au désert; des oiseaux de proie; d'insolents usurpateurs; des voleurs sans retenue et sans conscience; les Blancs ont été tout cela et pis encore dans ce malheureux Nouveau-Monde qui aurait bien voulu rester toujours inconnu. Le grand et vieux fleuve qui descend des régions mystérieuses et inexplorées des montagnes Rocheuses a dû se plier au joug des envahisseurs: ses flots majestueux, jusqu'alors purs et calmes comme l'azur des cieux, ont écumé sous les coups redoublés de la vapeur, se sont souillés des détritus d'usines, ont charrié des fardeaux, ont été réduits en esclavage. En même temps, des fermes, des parcs, des avenues, des villages, des villes, des palais ont surgi comme par enchantement sur les rives du vénérable cours d'eau. La solitude et son paisible silence, le désert et sa paix profonde, ont disparu. Væ victis! tel a été le premier et dernier mot de la civilisation.
Bien loin, bien loin de la civilisation, s'étendent à l'infini, dans les vastes Amériques, des plaines immenses entrecoupées de prairies plus immenses encore. C'est, ou plutôt, ce fut le territoire Indien. Ces TERRES d'OR, convoitées par d'acharnés aventuriers, sont devenues la proie du premier occupant; elles ont été divisées, morcelées, mises en lambeaux par leurs insatiables hôtes: la solitude a été mise au pillage; chacun a voulu avoir sa part à la curée. Arpenteurs, spéculateurs, locataires, fermiers, trafiquants, forestiers, chasseurs, et par-dessus tout chercheurs d'aventures, se sont abattus par légions sur le patrimoine Indien et s'en sont emparés violemment, par droit de conquête. Les enfants perdus de la civilisation se sont installés là comme chez eux, et bientôt les noms de Kansas, de Nebraska, sont devenus aussi familiers que ceux de New-York, Londres, ou Paris: les Pawnies, les Ottawas, les Ottoes, les Kickappos, les Puncas, toutes les peuplades aborigènes ont disparu successivement comme des foyers éteints, refoulées par l'incessante et implacable pression des Faces-Pâles. Des ogres au désert; des oiseaux de proie; d'insolents usurpateurs; des voleurs sans retenue et sans conscience; les Blancs ont été tout cela et pis encore dans ce malheureux Nouveau-Monde qui aurait bien voulu rester toujours inconnu. Le grand et vieux fleuve qui descend des régions mystérieuses et inexplorées des montagnes Rocheuses a dû se plier au joug des envahisseurs: ses flots majestueux, jusqu'alors purs et calmes comme l'azur des cieux, ont écumé sous les coups redoublés de la vapeur, se sont souillés des détritus d'usines, ont charrié des fardeaux, ont été réduits en esclavage. En même temps, des fermes, des parcs, des avenues, des villages, des villes, des palais ont surgi comme par enchantement sur les rives du vénérable cours d'eau. La solitude et son paisible silence, le désert et sa paix profonde, ont disparu. Væ victis! tel a été le premier et dernier mot de la civilisation.