Author: | Henryk Sienkiewicz | ISBN: | 1230000256393 |
Publisher: | NA | Publication: | July 30, 2014 |
Imprint: | Language: | French |
Author: | Henryk Sienkiewicz |
ISBN: | 1230000256393 |
Publisher: | NA |
Publication: | July 30, 2014 |
Imprint: | |
Language: | French |
Ce livre comporte une table des matières dynamique, a été relu et corrigé.
Extrait: Caïus Septimus Cinna était un patricien romain. Sa jeunesse s’était passée aux légions, dans l’âpre vie des camps. Plus tard, il était revenu à Rome pour jouir de la gloire, de la volupté et des avantages que pouvait lui procurer une fortune très grande, bien qu’un peu écornée déjà.
Et, à outrance, jusqu’à l’excès, il avait joui de tout ce que pouvait donner l’énorme ville. Ses nuits se passaient en festins dans les magnifiques villas suburbaines ; il employait ses journées à faire de l’escrime chez les lanistes, à disserter avec les rhéteurs aux tépidaria des thermes, — où, entre deux thèses, on avait coutume d’épiloguer sur les racontars de la ville et du monde... — il les passait au cirque, aux courses, aux luttes de gladiateurs, ou bien au milieu des joueurs de harpe, des devineresses de Thrace et des suaves danseuses que l’on faisait venir des îles de l’Archipel. Parent, par sa mère, du fameux Lucullus, il avait, semblait-il, hérité de son penchant pour les mets recherchés. Sa table était servie de vins de Grèce, d’huîtres napolitaines, de grasses sauterelles cuites au miel du Pont. Des poissons de la Mer Rouge aux perdrix blanches du Borysthène, tout ce que possédait Rome, Cinna devait le posséder. Toutefois, il jouissait de tout cela non pas en soldat outrancier, mais en praticien éclectique.
Il s’était suggéré, — peut-être même avait-il éveillé en soi, — le goût des belles choses : il raffolait des statuettes venant des fouilles de Corinthe, des épilychnions de l’Attique, des poteries étrusques ou importées du lointain pays des Sères, des mosaïques romaines, des tissus de l’Euphrate, des parfums de l’Arabie, et de tant d’autres babioles singulières dont la recherche occupait la futilité de son existence de patricien. Il savait aussi en parler, en connaisseur épris d’art, avec des vieillards édentés, qui, à table, couronnaient de roses leur calvitie, et mâchaient de l’héliotrope au dessert pour se rafraîchir l’haleine.
De même, il ressentait la beauté d’une période de Cicéron, la grâce d’un vers d’Horace ou d’Ovide.
Élevé par un rhéteur d’Athènes, il parlait couramment le grec, connaissait par cœur des passages entiers de l’Iliade et pouvait, au cours d’un festin, chanter les poésies d’Anacréon jusqu’à l’enrouement complet, ou bien l’ébriété finale. De son maître et d’autres encore, il tenait des aperçus de philosophie et en savait assez pour comprendre sommairement l’architecture de tant d’édifices intellectuels, érigés en Hellade ou bien aux colonies.
Ce livre comporte une table des matières dynamique, a été relu et corrigé.
Extrait: Caïus Septimus Cinna était un patricien romain. Sa jeunesse s’était passée aux légions, dans l’âpre vie des camps. Plus tard, il était revenu à Rome pour jouir de la gloire, de la volupté et des avantages que pouvait lui procurer une fortune très grande, bien qu’un peu écornée déjà.
Et, à outrance, jusqu’à l’excès, il avait joui de tout ce que pouvait donner l’énorme ville. Ses nuits se passaient en festins dans les magnifiques villas suburbaines ; il employait ses journées à faire de l’escrime chez les lanistes, à disserter avec les rhéteurs aux tépidaria des thermes, — où, entre deux thèses, on avait coutume d’épiloguer sur les racontars de la ville et du monde... — il les passait au cirque, aux courses, aux luttes de gladiateurs, ou bien au milieu des joueurs de harpe, des devineresses de Thrace et des suaves danseuses que l’on faisait venir des îles de l’Archipel. Parent, par sa mère, du fameux Lucullus, il avait, semblait-il, hérité de son penchant pour les mets recherchés. Sa table était servie de vins de Grèce, d’huîtres napolitaines, de grasses sauterelles cuites au miel du Pont. Des poissons de la Mer Rouge aux perdrix blanches du Borysthène, tout ce que possédait Rome, Cinna devait le posséder. Toutefois, il jouissait de tout cela non pas en soldat outrancier, mais en praticien éclectique.
Il s’était suggéré, — peut-être même avait-il éveillé en soi, — le goût des belles choses : il raffolait des statuettes venant des fouilles de Corinthe, des épilychnions de l’Attique, des poteries étrusques ou importées du lointain pays des Sères, des mosaïques romaines, des tissus de l’Euphrate, des parfums de l’Arabie, et de tant d’autres babioles singulières dont la recherche occupait la futilité de son existence de patricien. Il savait aussi en parler, en connaisseur épris d’art, avec des vieillards édentés, qui, à table, couronnaient de roses leur calvitie, et mâchaient de l’héliotrope au dessert pour se rafraîchir l’haleine.
De même, il ressentait la beauté d’une période de Cicéron, la grâce d’un vers d’Horace ou d’Ovide.
Élevé par un rhéteur d’Athènes, il parlait couramment le grec, connaissait par cœur des passages entiers de l’Iliade et pouvait, au cours d’un festin, chanter les poésies d’Anacréon jusqu’à l’enrouement complet, ou bien l’ébriété finale. De son maître et d’autres encore, il tenait des aperçus de philosophie et en savait assez pour comprendre sommairement l’architecture de tant d’édifices intellectuels, érigés en Hellade ou bien aux colonies.