Author: | Théophile Gautier | ISBN: | 1230001722819 |
Publisher: | Théophile Gautier | Publication: | June 17, 2017 |
Imprint: | Language: | French |
Author: | Théophile Gautier |
ISBN: | 1230001722819 |
Publisher: | Théophile Gautier |
Publication: | June 17, 2017 |
Imprint: | |
Language: | French |
EXTRAIT:
À Jean Duseigneur
I
Oh ! mon Jean Duseigneur, que le siècle où nous sommes
Est mauvais pour nous tous, oseurs et jeunes hommes,
Religieux de l’art que l’on nous a gâté !
L’on ne croit plus à rien ; — le stylet du sarcasme
A tué tout amour et tout enthousiasme ;
Le présent est désenchanté.
L’on cherche, l’on raisonne ; au fond de chaque chose
On fouille avidement, jusqu’à trouver la prose,
Comme si l’on voulait se prouver son néant.
Tout est grêle et mesquin dans cette époque étroite
Où Victor Hugo, seul, porte sa tête droite
Et crève les plafonds de son crâne géant.
L’avenir menaçant, dans ses noires ténèbres,
Ne présente à nos yeux que visions funèbres ;
Un aveugle destin au gouffre nous conduit ;
Pour guider notre esquif sur cette mer profonde,
Dont tous les vents ligués fouettent, en grondant, l’onde,
Pas une étoile dans la nuit !
L’art et les dieux s’en vont. — La jeune poésie
Fait de la terre au ciel voler sa fantaisie
Et plie à tous les tons sa pure et chaste voix.
On ne l’écoute pas. — Ses chants que rien n’égale
Sont perdus comme ceux de la pauvre cigale,
Du grillon du foyer ou de l’oiseau des bois.
Craignant le temps rongeur pour son œuvre fragile,
Le sculpteur veut changer son plâtre et son argile
A l’airain de Corinthe, au marbre de Paros :
Le riche, gorgé d’or, marchande son salaire,
Hésite, et n’ose pas lui jeter de quoi faire
L’éternité de ses héros.
EXTRAIT:
À Jean Duseigneur
I
Oh ! mon Jean Duseigneur, que le siècle où nous sommes
Est mauvais pour nous tous, oseurs et jeunes hommes,
Religieux de l’art que l’on nous a gâté !
L’on ne croit plus à rien ; — le stylet du sarcasme
A tué tout amour et tout enthousiasme ;
Le présent est désenchanté.
L’on cherche, l’on raisonne ; au fond de chaque chose
On fouille avidement, jusqu’à trouver la prose,
Comme si l’on voulait se prouver son néant.
Tout est grêle et mesquin dans cette époque étroite
Où Victor Hugo, seul, porte sa tête droite
Et crève les plafonds de son crâne géant.
L’avenir menaçant, dans ses noires ténèbres,
Ne présente à nos yeux que visions funèbres ;
Un aveugle destin au gouffre nous conduit ;
Pour guider notre esquif sur cette mer profonde,
Dont tous les vents ligués fouettent, en grondant, l’onde,
Pas une étoile dans la nuit !
L’art et les dieux s’en vont. — La jeune poésie
Fait de la terre au ciel voler sa fantaisie
Et plie à tous les tons sa pure et chaste voix.
On ne l’écoute pas. — Ses chants que rien n’égale
Sont perdus comme ceux de la pauvre cigale,
Du grillon du foyer ou de l’oiseau des bois.
Craignant le temps rongeur pour son œuvre fragile,
Le sculpteur veut changer son plâtre et son argile
A l’airain de Corinthe, au marbre de Paros :
Le riche, gorgé d’or, marchande son salaire,
Hésite, et n’ose pas lui jeter de quoi faire
L’éternité de ses héros.