Author: | GUSTAVE AIMARD | ISBN: | 1230001111262 |
Publisher: | GILBERT TEROL | Publication: | May 12, 2016 |
Imprint: | Language: | French |
Author: | GUSTAVE AIMARD |
ISBN: | 1230001111262 |
Publisher: | GILBERT TEROL |
Publication: | May 12, 2016 |
Imprint: | |
Language: | French |
Extrait :
Depuis la découverte des riches placeres de la Californie et de la rivière Frazer, l’Amérique septentrionale est entrée dans une ère de transformationtellement active, la civilisation a si bien marché à pas de géant que, pour les poètes et les rêveurs amoureux des grands spectacles de la nature, il n’est plus qu’une contrée, encore aujourd’hui presque inconnue, où ils puissent jouir de l’aspect majestueux et grandiose des mystérieuses savanes américaines.
C’est là seulement que se dérouleront à leurs yeux éblouis, avec leurs émouvants contrastes et leurs harmonies saisissantes, ces immenses océans de verdure ou de sable qui s’étendent à l’infini, silencieux, sombres et menaçants, sous le regard tout-puissant du Créateur.
Cette contrée, dont les coups pressés de la pioche des squatters n’ont pas encore troublé les échos, est le Far-West, c’est-à-dire l’ouest lointain.
Là les Indiens règnent encore en maîtres, sillonnant dans tous les sens, au galop de mustangs aussi indomptés qu’eux-mêmes, ces vastes solitudes dont ils connaissent tous les mystères, chassant les bisons et les chevaux sauvages, guerroyant entre eux ou poursuivant à outrance les chasseurs et les trappeurs blancs assez téméraires pour oser s’aventurer dans ce dernier et formidable refuge des Peaux-Rouges.
Le 27 juillet 1858, trois heures environ avant le coucher du soleil, un cavalier, monté sur un magnifique mustang, suivait insoucieusement les rives du rio Vermejo, affluent perdu du rio Grande del Norte, dans lequel il se jette après un parcours de soixante-dix à quatre-vingts lieues à travers le désert.
Ce cavalier, revêtu du costume de cuir des chasseurs mexicains, était, autant qu’on en pouvait juger, un homme d’une trentaine d’années au plus ; il avait la taille haute et bien prise, les manières élégantes et les gestes gracieux. Les lignes de son visage étaient fières et arrêtées, et ses traits hardis, empreints d’une expression de franchise et de bonté, inspiraient, au premier coup d’œil, le respect et la sympathie.
Ses yeux bleus, au regard doux et voilé comme celui d’une femme, les épaisses boucles de ses cheveux blonds qui s’échappaient en larges touffes de dessous les ailes de son chapeau de poil de vigogne et ruisselaient en désordre sur ses épaules, la blancheur mate de sa peau, qui tranchait avec le teint olivâtre légèrement bronzé particulier aux Mexicains, donnaient à supposer qu’il n’avait pas vu le jour sous le climat de l’Amérique espagnole.
Cet homme, à l’apparence si paisible et si peu redoutable, cachait sous une enveloppe légèrement efféminée un courage de lion que rien ne pouvait non pas émouvoir, mais seulement étonner ; la peau fine et presque diaphane de ses mains blanches aux ongles rosés servait d’enveloppe à des nerfs d’acier.
Au moment où nous le mettons en scène, ce personnage semblait être à moitié endormi sur la selle et laissait aller à son gré son mustang, qui profitait de cette liberté, à laquelle il n’était pas accoutumée pour s’arrêter presque à chaque pas et happer du bout des lèvres les brins d’herbes jaunis par le soleil qu’il rencontrait sur son chemin.
L’endroit où se trouvait notre cavalier était une plaine assez vaste, partagée en deux parties égales par le rio Vermejo, dont les rives étaient escarpées et semées çà et là de rochers pelés et grisâtres.
Cette plaine était encaissée entre deux chaînes de collines qui s’élevaient à droite et à gauche par des ondulations successives, jusqu’à former à l’horizon de hauts pics couverts de neige sur lesquels jouaient les lueurs purpurines du couchant.
Cependant, malgré la somnolence réelle ou affectée du cavalier, parfois ses yeux s’ouvraient à demi, et sans tourner la tête il jetait autour de lui un regard investigateur, sans que pour cela un muscle de son visage trahît une appréhension, bien pardonnable du reste, dans une région où l’ennemi le moins redoutable pour l’homme est le jaguar.
Le voyageur ou le chasseur, car nous ne savons encore qui il est, continuait sa route, d’une allure de plus en plus lente et insoucieuse ; il venait de passer à une cinquantaine de pas environ d’un rocher qui s’élevait comme une sentinelle solitaire sur la rive du rio Vermejo, lorsque de derrière ce rocher, où il se tenait probablement en embuscade, sortit à demi un homme armé d’un rifle américain.
Cet individu examina un instant avec la plus profonde attention le voyageur, puis il épaula vivement son rifle, pressa la détente, et le coup partit.
Le cavalier bondit sur sa selle, poussa un cri étouffé, ouvrit les bras, abandonna les étriers et roula sur l’herbe, où, après quelques convulsions, il resta immobile.
Le cheval épouvanté se cabra, lança quelques ruades et partit à fond de train dans la direction des bois éparpillés sur les collines, au milieu desquels il ne tarda pas à disparaître.
Extrait :
Depuis la découverte des riches placeres de la Californie et de la rivière Frazer, l’Amérique septentrionale est entrée dans une ère de transformationtellement active, la civilisation a si bien marché à pas de géant que, pour les poètes et les rêveurs amoureux des grands spectacles de la nature, il n’est plus qu’une contrée, encore aujourd’hui presque inconnue, où ils puissent jouir de l’aspect majestueux et grandiose des mystérieuses savanes américaines.
C’est là seulement que se dérouleront à leurs yeux éblouis, avec leurs émouvants contrastes et leurs harmonies saisissantes, ces immenses océans de verdure ou de sable qui s’étendent à l’infini, silencieux, sombres et menaçants, sous le regard tout-puissant du Créateur.
Cette contrée, dont les coups pressés de la pioche des squatters n’ont pas encore troublé les échos, est le Far-West, c’est-à-dire l’ouest lointain.
Là les Indiens règnent encore en maîtres, sillonnant dans tous les sens, au galop de mustangs aussi indomptés qu’eux-mêmes, ces vastes solitudes dont ils connaissent tous les mystères, chassant les bisons et les chevaux sauvages, guerroyant entre eux ou poursuivant à outrance les chasseurs et les trappeurs blancs assez téméraires pour oser s’aventurer dans ce dernier et formidable refuge des Peaux-Rouges.
Le 27 juillet 1858, trois heures environ avant le coucher du soleil, un cavalier, monté sur un magnifique mustang, suivait insoucieusement les rives du rio Vermejo, affluent perdu du rio Grande del Norte, dans lequel il se jette après un parcours de soixante-dix à quatre-vingts lieues à travers le désert.
Ce cavalier, revêtu du costume de cuir des chasseurs mexicains, était, autant qu’on en pouvait juger, un homme d’une trentaine d’années au plus ; il avait la taille haute et bien prise, les manières élégantes et les gestes gracieux. Les lignes de son visage étaient fières et arrêtées, et ses traits hardis, empreints d’une expression de franchise et de bonté, inspiraient, au premier coup d’œil, le respect et la sympathie.
Ses yeux bleus, au regard doux et voilé comme celui d’une femme, les épaisses boucles de ses cheveux blonds qui s’échappaient en larges touffes de dessous les ailes de son chapeau de poil de vigogne et ruisselaient en désordre sur ses épaules, la blancheur mate de sa peau, qui tranchait avec le teint olivâtre légèrement bronzé particulier aux Mexicains, donnaient à supposer qu’il n’avait pas vu le jour sous le climat de l’Amérique espagnole.
Cet homme, à l’apparence si paisible et si peu redoutable, cachait sous une enveloppe légèrement efféminée un courage de lion que rien ne pouvait non pas émouvoir, mais seulement étonner ; la peau fine et presque diaphane de ses mains blanches aux ongles rosés servait d’enveloppe à des nerfs d’acier.
Au moment où nous le mettons en scène, ce personnage semblait être à moitié endormi sur la selle et laissait aller à son gré son mustang, qui profitait de cette liberté, à laquelle il n’était pas accoutumée pour s’arrêter presque à chaque pas et happer du bout des lèvres les brins d’herbes jaunis par le soleil qu’il rencontrait sur son chemin.
L’endroit où se trouvait notre cavalier était une plaine assez vaste, partagée en deux parties égales par le rio Vermejo, dont les rives étaient escarpées et semées çà et là de rochers pelés et grisâtres.
Cette plaine était encaissée entre deux chaînes de collines qui s’élevaient à droite et à gauche par des ondulations successives, jusqu’à former à l’horizon de hauts pics couverts de neige sur lesquels jouaient les lueurs purpurines du couchant.
Cependant, malgré la somnolence réelle ou affectée du cavalier, parfois ses yeux s’ouvraient à demi, et sans tourner la tête il jetait autour de lui un regard investigateur, sans que pour cela un muscle de son visage trahît une appréhension, bien pardonnable du reste, dans une région où l’ennemi le moins redoutable pour l’homme est le jaguar.
Le voyageur ou le chasseur, car nous ne savons encore qui il est, continuait sa route, d’une allure de plus en plus lente et insoucieuse ; il venait de passer à une cinquantaine de pas environ d’un rocher qui s’élevait comme une sentinelle solitaire sur la rive du rio Vermejo, lorsque de derrière ce rocher, où il se tenait probablement en embuscade, sortit à demi un homme armé d’un rifle américain.
Cet individu examina un instant avec la plus profonde attention le voyageur, puis il épaula vivement son rifle, pressa la détente, et le coup partit.
Le cavalier bondit sur sa selle, poussa un cri étouffé, ouvrit les bras, abandonna les étriers et roula sur l’herbe, où, après quelques convulsions, il resta immobile.
Le cheval épouvanté se cabra, lança quelques ruades et partit à fond de train dans la direction des bois éparpillés sur les collines, au milieu desquels il ne tarda pas à disparaître.