Lorenzaccio

Fiction & Literature, Drama, Nonfiction, Entertainment
Cover of the book Lorenzaccio by Alfred De Musset, Alfred De Musset
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Author: Alfred De Musset ISBN: 1230000229540
Publisher: Alfred De Musset Publication: March 31, 2014
Imprint: Language: French
Author: Alfred De Musset
ISBN: 1230000229540
Publisher: Alfred De Musset
Publication: March 31, 2014
Imprint:
Language: French

EXTRAIT:

Acte I

Scène 1

Un jardin. -Clair de lune ; un pavillon dans le fond, un autre sur le

devant.

Entrent le Duc et Lorenzo, couverts de leurs manteaux; GIOMO, une

lanterne à la main.

LE DUC : Qu’elle se fasse attendre encore un quart d’heure, et je m’en

vais. Il fait un froid de tous les diables.

LORENZO : Patience, Altesse, patience.

LE DUC : Elle devait sortir de chez sa mère à minuit ; il est minuit,

et elle ne vient pourtant pas.

LORENZO : Si elle ne vient pas, dites que je suis un sot, et que la

vieille mère est une honnête femme.

LE DUC : Entrailles du pape ! avec tout cela je suis volé d’un millier

de ducats.

LORENZO : Nous n’avons avancé que moitié. je réponds de la petite.

Deux grands yeux languissants, cela ne trompe pas. Quoi de plus

curieux pour le connaisseur que la débauche à la mamelle ? Voir dans

un enfant de quinze ans la rouée à venir ; étudier, ensemencer,

infiltrer paternellement le filon mystérieux du vice dans un conseil

d’ami, dans une caresse au menton ; -tout dire et ne rien dire, selon

le caractère des parents; -habituer doucement l’imagination qui se

développe à donner des corps à ses fantômes, à toucher ce qui

l’effraie, à mépriser ce qui la protège ! Cela va plus vite qu’on ne

pense ; le vrai mérite est de frapper juste.Et quel trésor que celle-

ci! tout ce qui peut faire passer une nuit délicieuse à Votre Altesse

! Tant de pudeur! Une jeune chatte qui veut bien des confitures, mais

qui ne veut pas se salir la patte. Proprette comme une Flamande! La

médiocrité bourgeoise en personne. D’ailleurs, fille de bonnes gens, à

qui leur peu de fortune n’a pas permis une éducation solide ; point de

fond dans les principes, rien qu’un léger vernis ; mais quel flot

violent d’un fleuve magnifique sous cette couche de glace fragile, qui

craque à chaque pas! jamais arbuste en fleurs n’a promis de fruits

plus rares, jamais je n’ai humé dans une atmosphère enfantine plus

exquise odeur de courtisanerie.

LE DUC : Sacrebleu! je ne vois pas le signal. Il faut pourtant que

j’aille au bal chez Nasi : c’est aujourd’hui qu’il marie sa fille.

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EXTRAIT:

Acte I

Scène 1

Un jardin. -Clair de lune ; un pavillon dans le fond, un autre sur le

devant.

Entrent le Duc et Lorenzo, couverts de leurs manteaux; GIOMO, une

lanterne à la main.

LE DUC : Qu’elle se fasse attendre encore un quart d’heure, et je m’en

vais. Il fait un froid de tous les diables.

LORENZO : Patience, Altesse, patience.

LE DUC : Elle devait sortir de chez sa mère à minuit ; il est minuit,

et elle ne vient pourtant pas.

LORENZO : Si elle ne vient pas, dites que je suis un sot, et que la

vieille mère est une honnête femme.

LE DUC : Entrailles du pape ! avec tout cela je suis volé d’un millier

de ducats.

LORENZO : Nous n’avons avancé que moitié. je réponds de la petite.

Deux grands yeux languissants, cela ne trompe pas. Quoi de plus

curieux pour le connaisseur que la débauche à la mamelle ? Voir dans

un enfant de quinze ans la rouée à venir ; étudier, ensemencer,

infiltrer paternellement le filon mystérieux du vice dans un conseil

d’ami, dans une caresse au menton ; -tout dire et ne rien dire, selon

le caractère des parents; -habituer doucement l’imagination qui se

développe à donner des corps à ses fantômes, à toucher ce qui

l’effraie, à mépriser ce qui la protège ! Cela va plus vite qu’on ne

pense ; le vrai mérite est de frapper juste.Et quel trésor que celle-

ci! tout ce qui peut faire passer une nuit délicieuse à Votre Altesse

! Tant de pudeur! Une jeune chatte qui veut bien des confitures, mais

qui ne veut pas se salir la patte. Proprette comme une Flamande! La

médiocrité bourgeoise en personne. D’ailleurs, fille de bonnes gens, à

qui leur peu de fortune n’a pas permis une éducation solide ; point de

fond dans les principes, rien qu’un léger vernis ; mais quel flot

violent d’un fleuve magnifique sous cette couche de glace fragile, qui

craque à chaque pas! jamais arbuste en fleurs n’a promis de fruits

plus rares, jamais je n’ai humé dans une atmosphère enfantine plus

exquise odeur de courtisanerie.

LE DUC : Sacrebleu! je ne vois pas le signal. Il faut pourtant que

j’aille au bal chez Nasi : c’est aujourd’hui qu’il marie sa fille.

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