FELICIA OU MES FREDAINES

Romance, Erotica
Cover of the book FELICIA OU MES FREDAINES by ANDRE ROBERT ANDREA DE NERCIAT, GILBERT TEROL
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Author: ANDRE ROBERT ANDREA DE NERCIAT ISBN: 1230000211145
Publisher: GILBERT TEROL Publication: January 20, 2014
Imprint: Language: French
Author: ANDRE ROBERT ANDREA DE NERCIAT
ISBN: 1230000211145
Publisher: GILBERT TEROL
Publication: January 20, 2014
Imprint:
Language: French

À Paris, une fille de treize à quatorze ans reçoit déjà quelques marques d’attention quand elle est jolie. À cet âge, si j’avais eu la clef des propos flatteurs qu’on commençait à me tenir, j’y aurais aisément reconnu l’hommage du désir. Mais, autant j’avais d’intelligence pour ce qu’il me fallait apprendre, autant j’étais bornée relativement à la galanterie. Me disait-on que l’on m’aimait, je répondais bonnement que j’aimais aussi ; mais sans me douter des plus intéressantes acceptions d’aimer, ce mot si commun ! Bref, je ne savais rien, rien du tout ; et sans des hasards heureux qui m’éclairèrent tout à coup, j’aurais peut-être croupi longtemps dans ma déplorable ignorance.

Au bout d’un an, Sylvino fut obligé de retourner en province pour quelques affaires d’intérêt. Nous ne fûmes pas plus tôt seules que sa femme se mit à vivre tout à fait différemment de ce qu’elle avait coutume. Plus de spectacles, plus de promenades, plus de parure. Elle arbora les grands bonnets, les fichus épais, les robes sérieuses ; elle s’éloigna peu à peu de toutes les sociétés. Nous ne bougeâmes plus des églises : comme je m’y ennuyais ! M. Béatin, prêtre-docteur et confesseur de ma tante, vint d’abord de temps en temps à la maison… ; puis il vint un peu plus souvent…, puis tous les jours…, puis il obtint qu’on renvoyât tout le monde quand il était là. J’étais aussi de trop ; je me retirais dans une pièce voisine. Curieuse un jour de savoir à quoi pouvaient s’occuper, avec tant de mystère, ma tante et le modeste Béatin, je vins heureusement à détourner un petit morceau de fer qui bouchait de mon côté le trou de la serrure, et je fus transportée de voir mes gens aussi distinctement que si j’eusse été dans la même chambre… Mais quelle fut ma surprise ! Le vénérable docteur, aux genoux de sa pénitente, avait le teint animé, l’œil étincelant… en tout, une physionomie absolument différente de celle que je lui avais connue jusqu’alors. Je crus rêver quand je le vis baiser avec passion une main qu’on lui abandonnait à peu près volontiers. Il demandait très instamment… je ne savais pas quoi ; mais sa harangue, qui paraissait fort vive, était accompagnée de gestes encore plus pressants ; il glissait une main hardie sous le fichu…, l’autre encore plus insolente se fourra brusquement… plus bas.

— Monstre ! s’écria tout à coup un homme qui sortit de l’alcôve, furieux et tirant l’épée ; c’est pousser trop loin l’infamie et abuser trop indignement de sa crédulité. Tu vas périr, scélérat !

Un éclair de rage partit des yeux du Tartufe, mais il ne laissa pas de se contraindre ! la belle pénitente avait déjà perdu l’usage de ses sens. Le terrible trouble-fête était un nommé Lambert, sculpteur, intime de Sylvino, courtisan assidu de ma tante, et l’un de ceux à qui Béatin faisait défendre la porte le plus sévèrement. Lambert, ce jour-là, s’était introduit, je ne sais comment, dans la maison ; cependant l’évanouissement de Sylvina sauva le docteur ; un homme délicat est plus pressé de secourir sa maîtresse que de tuer un rival. Mais Lambert, en donnant des soins à son amie, ne laissait pas d’enjoindre au traître, en termes fort cavaliers, de se retirer au plus vite. Celui-ci voulait disputer la place : alors deux larges soufflets détachés avec vigueur sur ses joues potelées lui firent sentir la nécessité de ne point opposer ses faibles raisons à qui en avait d’aussi convaincantes.

Pendant qu’il cherchait sa calotte et rattachait son manteau, je le devançai dans l’escalier, pour jouir à mon aise de sa confusion ; mais inutilement, le drôle avait déjà repris son masque ; il me salua bénignement et avec l’apparence d’autant de sang-froid que s’il ne lui fût rien arrivé.

De retour à mon cher trou, je vis qu’on disputait vivement. Sylvina pleurait, disait des injures ; Lambert, à ses pieds, parlait avec émotion et tâchait de fléchir ce ressentiment injuste. L’entretien fut long et finit par un faible raccommodement. Lambert obtint à son tour de baiser une main ; après beaucoup de sollicitations, on voulut bien encore lui présenter les deux joues. On était ensemble couci-couci quand on se sépara.

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À Paris, une fille de treize à quatorze ans reçoit déjà quelques marques d’attention quand elle est jolie. À cet âge, si j’avais eu la clef des propos flatteurs qu’on commençait à me tenir, j’y aurais aisément reconnu l’hommage du désir. Mais, autant j’avais d’intelligence pour ce qu’il me fallait apprendre, autant j’étais bornée relativement à la galanterie. Me disait-on que l’on m’aimait, je répondais bonnement que j’aimais aussi ; mais sans me douter des plus intéressantes acceptions d’aimer, ce mot si commun ! Bref, je ne savais rien, rien du tout ; et sans des hasards heureux qui m’éclairèrent tout à coup, j’aurais peut-être croupi longtemps dans ma déplorable ignorance.

Au bout d’un an, Sylvino fut obligé de retourner en province pour quelques affaires d’intérêt. Nous ne fûmes pas plus tôt seules que sa femme se mit à vivre tout à fait différemment de ce qu’elle avait coutume. Plus de spectacles, plus de promenades, plus de parure. Elle arbora les grands bonnets, les fichus épais, les robes sérieuses ; elle s’éloigna peu à peu de toutes les sociétés. Nous ne bougeâmes plus des églises : comme je m’y ennuyais ! M. Béatin, prêtre-docteur et confesseur de ma tante, vint d’abord de temps en temps à la maison… ; puis il vint un peu plus souvent…, puis tous les jours…, puis il obtint qu’on renvoyât tout le monde quand il était là. J’étais aussi de trop ; je me retirais dans une pièce voisine. Curieuse un jour de savoir à quoi pouvaient s’occuper, avec tant de mystère, ma tante et le modeste Béatin, je vins heureusement à détourner un petit morceau de fer qui bouchait de mon côté le trou de la serrure, et je fus transportée de voir mes gens aussi distinctement que si j’eusse été dans la même chambre… Mais quelle fut ma surprise ! Le vénérable docteur, aux genoux de sa pénitente, avait le teint animé, l’œil étincelant… en tout, une physionomie absolument différente de celle que je lui avais connue jusqu’alors. Je crus rêver quand je le vis baiser avec passion une main qu’on lui abandonnait à peu près volontiers. Il demandait très instamment… je ne savais pas quoi ; mais sa harangue, qui paraissait fort vive, était accompagnée de gestes encore plus pressants ; il glissait une main hardie sous le fichu…, l’autre encore plus insolente se fourra brusquement… plus bas.

— Monstre ! s’écria tout à coup un homme qui sortit de l’alcôve, furieux et tirant l’épée ; c’est pousser trop loin l’infamie et abuser trop indignement de sa crédulité. Tu vas périr, scélérat !

Un éclair de rage partit des yeux du Tartufe, mais il ne laissa pas de se contraindre ! la belle pénitente avait déjà perdu l’usage de ses sens. Le terrible trouble-fête était un nommé Lambert, sculpteur, intime de Sylvino, courtisan assidu de ma tante, et l’un de ceux à qui Béatin faisait défendre la porte le plus sévèrement. Lambert, ce jour-là, s’était introduit, je ne sais comment, dans la maison ; cependant l’évanouissement de Sylvina sauva le docteur ; un homme délicat est plus pressé de secourir sa maîtresse que de tuer un rival. Mais Lambert, en donnant des soins à son amie, ne laissait pas d’enjoindre au traître, en termes fort cavaliers, de se retirer au plus vite. Celui-ci voulait disputer la place : alors deux larges soufflets détachés avec vigueur sur ses joues potelées lui firent sentir la nécessité de ne point opposer ses faibles raisons à qui en avait d’aussi convaincantes.

Pendant qu’il cherchait sa calotte et rattachait son manteau, je le devançai dans l’escalier, pour jouir à mon aise de sa confusion ; mais inutilement, le drôle avait déjà repris son masque ; il me salua bénignement et avec l’apparence d’autant de sang-froid que s’il ne lui fût rien arrivé.

De retour à mon cher trou, je vis qu’on disputait vivement. Sylvina pleurait, disait des injures ; Lambert, à ses pieds, parlait avec émotion et tâchait de fléchir ce ressentiment injuste. L’entretien fut long et finit par un faible raccommodement. Lambert obtint à son tour de baiser une main ; après beaucoup de sollicitations, on voulut bien encore lui présenter les deux joues. On était ensemble couci-couci quand on se sépara.

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