Author: | FREDOR DOSTOIEVSKI | ISBN: | 1230000213188 |
Publisher: | GILBERT TEROL | Publication: | January 27, 2014 |
Imprint: | Language: | French |
Author: | FREDOR DOSTOIEVSKI |
ISBN: | 1230000213188 |
Publisher: | GILBERT TEROL |
Publication: | January 27, 2014 |
Imprint: | |
Language: | French |
Cette fois, je feuillette le « Carnet » d’une autre personne. Il ne s’agit plus de moi, du tout ; il est question de quelqu’un dont je ne suis aucunement solidaire, et toute préface plus longue me paraît inutile.
Carnet de « la personne ».
Semion Ardalionovitch me dit avant-hier :
— Ivan Ivanitch, ne t’arrive-t-il jamais d’être ivre ?
Singulière question, dont, pourtant, je ne m’offensai pas. Je suis un homme placide que certaines gens veulent faire passer pour fou. — Naguère un peintre a désiré faire mon portrait. J’ai consenti à poser et la toile a été admise dans une exposition. Quelques jours après, je lisais dans un journal qui parlait de ce portrait : « Allez voir ce visage maladif et convulsé qui semble celui d’un candidat à la folie… » Je ne m’en vexai en rien. Je n’ai pas assez de valeur comme littérateur pour devenir fou à force de talent. J’ai écrit une nouvelle : on ne l’a pas insérée. J’ai écrit un feuilleton : on l’a refusé. J’ai porté ce feuilleton à beaucoup de directeurs de journaux : on n’en a voulu nulle part.
— Ce que vous écrivez manque de sel, m’a-t-on dit.
— « De quel genre de sel ? ai-je demandé un peu ironiquement. De sel attique ? »
On ne m’a pas compris du tout. Alors, le plus souvent, je traduis des livres français pour nos éditeurs. Je rédige aussi des réclames pour les négociants : « Acheteurs, attention ! Procurez-vous cet article rare : le thé rouge des plantations de… »
Pour un panégyrique de feu Piotr Matveievitch, j’ai reçu une assez forte somme. J’ai composé l’Art de plaire aux Dames,
Cette fois, je feuillette le « Carnet » d’une autre personne. Il ne s’agit plus de moi, du tout ; il est question de quelqu’un dont je ne suis aucunement solidaire, et toute préface plus longue me paraît inutile.
Carnet de « la personne ».
Semion Ardalionovitch me dit avant-hier :
— Ivan Ivanitch, ne t’arrive-t-il jamais d’être ivre ?
Singulière question, dont, pourtant, je ne m’offensai pas. Je suis un homme placide que certaines gens veulent faire passer pour fou. — Naguère un peintre a désiré faire mon portrait. J’ai consenti à poser et la toile a été admise dans une exposition. Quelques jours après, je lisais dans un journal qui parlait de ce portrait : « Allez voir ce visage maladif et convulsé qui semble celui d’un candidat à la folie… » Je ne m’en vexai en rien. Je n’ai pas assez de valeur comme littérateur pour devenir fou à force de talent. J’ai écrit une nouvelle : on ne l’a pas insérée. J’ai écrit un feuilleton : on l’a refusé. J’ai porté ce feuilleton à beaucoup de directeurs de journaux : on n’en a voulu nulle part.
— Ce que vous écrivez manque de sel, m’a-t-on dit.
— « De quel genre de sel ? ai-je demandé un peu ironiquement. De sel attique ? »
On ne m’a pas compris du tout. Alors, le plus souvent, je traduis des livres français pour nos éditeurs. Je rédige aussi des réclames pour les négociants : « Acheteurs, attention ! Procurez-vous cet article rare : le thé rouge des plantations de… »
Pour un panégyrique de feu Piotr Matveievitch, j’ai reçu une assez forte somme. J’ai composé l’Art de plaire aux Dames,