Author: | LOUIS CHARLES WILFRID DORION | ISBN: | 1230002770833 |
Publisher: | GILBERT TEROL | Publication: | November 1, 2018 |
Imprint: | Language: | French |
Author: | LOUIS CHARLES WILFRID DORION |
ISBN: | 1230002770833 |
Publisher: | GILBERT TEROL |
Publication: | November 1, 2018 |
Imprint: | |
Language: | French |
On touchait à la fin du mois d’avril 1837. Les dernières neiges venaient de disparaître et, déjà, dans presque toutes les campagnes, celles du moins à l’ouest et au sud-ouest de Québec, alors la métropole du Bas-Canada, la verdure commençait à rappeler la douce saison du printemps.
Le pays, à cette époque, était fort agité. La session parlementaire, qui avait été prorogée peu de temps auparavant, n’avait que trop bien fait prévoir aux personnes sensées que la querelle, depuis longtemps engagée entre les gouverneurs de notre province et le parti de la chambre électorale dit des Patriotes, qui ne faisait que s’envenimer de jour en jour, conduirait inévitablement le pays à un bouleversement, si des deux partis politiques alors en présence aucun ne consentait à céder quelques-unes de ses réclamations.
Déjà des troubles, qui pouvaient faire présager les combats sanglants de la révolution qui allait s’ensuivre et dont un si grand nombre de victimes parmi nos compatriotes devaient payer de leur sang les bienfaits politiques qu’elle apportait au pays, avaient éclaté dans plusieurs endroits dispersés et, principalement dans les paroisses situées sur la rivière Richelieu, qui se firent généralement l’écho des discours patriotiques de notre grand orateur, le célèbre Louis Joseph Papineau.
C’est ici le lieu de vous demander, chers lecteurs, si vous n’avez jamais fait le parcours en entier de la rivière Richelieu, qu’on appelle aussi quelquefois rivière Chambly ou de Sorel.
Ce fleuve qui tombe dans notre majestueux St-Laurent près de la petite ville de Sorel, tout en procurant un voyage très agréable, est en même temps une source d’émotions pour tout canadien-français, lorsqu’il approche du village de St-Denis qui lui rappelle un des événements les plus glorieux de notre histoire. C’est là, en effet, qu’une poignée de citoyens armés pour la défense de notre liberté repoussèrent, avec un courage héroïque que l’histoire a consacré, une armée anglaise de quinze cents hommes. Sur la rive opposée est situé St-Antoine. De là vinrent en grande partie ces hommes vigoureux qui devaient, avec des piques et des pioches et quelques fusils délabrés, faire reculer les soldats conduits par le colonel Gore.
Le village de St-Antoine n’est pas très considérable, mais c’est un fort joli endroit. Un de ses principaux agréments consiste dans la rivière Richelieu qui coule à ses pieds ; il y aussi la vue du Mont St-Hilaire, très souvent témoin de nombreux voyages de plaisir. C’est véritablement un magnifique panorama qui se déroule à vos yeux, et vous reconnaissez en même temps l’une des plus belles localités de la province de Québec, surtout pour les personnes qui vont passer à la campagne la saison d’été.
En commençant ce récit, nous disions que le mois d’avril touchait à sa fin.
Par une belle matinée de ce mois, vers dix heures, une jeune fille de dix-sept à dix-huit ans sortait de chez elle pour se rendre à un magasin du village, peu éloigné de sa demeure. Elle était très jolie et, quoique vêtue très simplement selon la coutume générale de la campagne, elle avait une figure maligne et gentille à la fois, qui lui donnait une beauté qu’on pourrait appeler printanière. Aussi depuis longtemps, captivait-elle tous les regards, non seulement des jeunes gens de sa place natale, mais surtout des étrangers qui venaient à St-Antoine pour y passer la belle saison.
Mathilde Gagnon, nous ne tairons pas son nom plus longtemps, était la fille d’un riche cultivateur possédant, sans contredit, la plus belle terre de St-Antoine, à l’exception de celle de son voisin Joseph Hervart.
Pour se rendre au magasin dont nous venons de parler, elle devait passer devant la propriété de M. Hervart. Or, sur cette terre, depuis l’aurore, un jeune homme labourait péniblement sans avoir cessé un seul instant de s’astreindre à son rude labeur et Mathilde ne pouvait manquer de le voir.
Bonjour Pierre, fit-elle, en s’adressant au jeune homme, puis après un court silence elle ajouta : « Tu veux donc toujours travailler comme un enragé, pas un moment de repos ! Mais il faut que cela cesse, tu sais, car je pourrais bien me fâcher à la fin ; ne pas venir me voir un instant dans la journée, cela n’est vraiment pas supportable. D’ailleurs je suppose que les travaux doivent achever, car si je ne me trompe, voilà bientôt une semaine que tu n’a pas quitté la charrue. »
On touchait à la fin du mois d’avril 1837. Les dernières neiges venaient de disparaître et, déjà, dans presque toutes les campagnes, celles du moins à l’ouest et au sud-ouest de Québec, alors la métropole du Bas-Canada, la verdure commençait à rappeler la douce saison du printemps.
Le pays, à cette époque, était fort agité. La session parlementaire, qui avait été prorogée peu de temps auparavant, n’avait que trop bien fait prévoir aux personnes sensées que la querelle, depuis longtemps engagée entre les gouverneurs de notre province et le parti de la chambre électorale dit des Patriotes, qui ne faisait que s’envenimer de jour en jour, conduirait inévitablement le pays à un bouleversement, si des deux partis politiques alors en présence aucun ne consentait à céder quelques-unes de ses réclamations.
Déjà des troubles, qui pouvaient faire présager les combats sanglants de la révolution qui allait s’ensuivre et dont un si grand nombre de victimes parmi nos compatriotes devaient payer de leur sang les bienfaits politiques qu’elle apportait au pays, avaient éclaté dans plusieurs endroits dispersés et, principalement dans les paroisses situées sur la rivière Richelieu, qui se firent généralement l’écho des discours patriotiques de notre grand orateur, le célèbre Louis Joseph Papineau.
C’est ici le lieu de vous demander, chers lecteurs, si vous n’avez jamais fait le parcours en entier de la rivière Richelieu, qu’on appelle aussi quelquefois rivière Chambly ou de Sorel.
Ce fleuve qui tombe dans notre majestueux St-Laurent près de la petite ville de Sorel, tout en procurant un voyage très agréable, est en même temps une source d’émotions pour tout canadien-français, lorsqu’il approche du village de St-Denis qui lui rappelle un des événements les plus glorieux de notre histoire. C’est là, en effet, qu’une poignée de citoyens armés pour la défense de notre liberté repoussèrent, avec un courage héroïque que l’histoire a consacré, une armée anglaise de quinze cents hommes. Sur la rive opposée est situé St-Antoine. De là vinrent en grande partie ces hommes vigoureux qui devaient, avec des piques et des pioches et quelques fusils délabrés, faire reculer les soldats conduits par le colonel Gore.
Le village de St-Antoine n’est pas très considérable, mais c’est un fort joli endroit. Un de ses principaux agréments consiste dans la rivière Richelieu qui coule à ses pieds ; il y aussi la vue du Mont St-Hilaire, très souvent témoin de nombreux voyages de plaisir. C’est véritablement un magnifique panorama qui se déroule à vos yeux, et vous reconnaissez en même temps l’une des plus belles localités de la province de Québec, surtout pour les personnes qui vont passer à la campagne la saison d’été.
En commençant ce récit, nous disions que le mois d’avril touchait à sa fin.
Par une belle matinée de ce mois, vers dix heures, une jeune fille de dix-sept à dix-huit ans sortait de chez elle pour se rendre à un magasin du village, peu éloigné de sa demeure. Elle était très jolie et, quoique vêtue très simplement selon la coutume générale de la campagne, elle avait une figure maligne et gentille à la fois, qui lui donnait une beauté qu’on pourrait appeler printanière. Aussi depuis longtemps, captivait-elle tous les regards, non seulement des jeunes gens de sa place natale, mais surtout des étrangers qui venaient à St-Antoine pour y passer la belle saison.
Mathilde Gagnon, nous ne tairons pas son nom plus longtemps, était la fille d’un riche cultivateur possédant, sans contredit, la plus belle terre de St-Antoine, à l’exception de celle de son voisin Joseph Hervart.
Pour se rendre au magasin dont nous venons de parler, elle devait passer devant la propriété de M. Hervart. Or, sur cette terre, depuis l’aurore, un jeune homme labourait péniblement sans avoir cessé un seul instant de s’astreindre à son rude labeur et Mathilde ne pouvait manquer de le voir.
Bonjour Pierre, fit-elle, en s’adressant au jeune homme, puis après un court silence elle ajouta : « Tu veux donc toujours travailler comme un enragé, pas un moment de repos ! Mais il faut que cela cesse, tu sais, car je pourrais bien me fâcher à la fin ; ne pas venir me voir un instant dans la journée, cela n’est vraiment pas supportable. D’ailleurs je suppose que les travaux doivent achever, car si je ne me trompe, voilà bientôt une semaine que tu n’a pas quitté la charrue. »